Photo : Cosimo Mirco Magliocca / Opéra national de Paris
Nouvelle production de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris, cet Enfant et les Sortilèges en démontre le haut niveau technique et la fraîcheur d’esprit. L’arrangement de la partition réalisé par Didier Puntos pour piano à quatre mains, flûte(s) et violoncelle, en retrouve les couleurs pastel ou acidulées – même si le satin orchestral disparaît forcément, au profit d’une immédiateté chambriste plus vive. D’un classicisme poétique non dénué de pointes coquines, la mise en scène de Jean Liermier dynamise l’espace arrondi de l’Amphithéâtre par un décor tout en angles, qui dénude seulement une frange enneigée de jardin désolé, comme elle assaisonne l’argument d’une vision plus pré-adolescente qu’enfantine. Du pendule qui manque à l’Horloge castrée jusqu’au bec verseur de la Théière « vrai beau gosse », du duo des Chats très hot au Feu qui vampe l’Enfant, les cris de panique ou de désir font monter autant la peur d’un monde onirique réveillé par magie que celle du monde adulte qui se tient à la porte de la chambre et de la vie. L’ensemble des jeunes chanteurs de l’Atelier lyrique se distingue par des qualités individuelles évidentes enrobées d’un travail d’équipe – scénique et choral – remarquablement équilibré. On retiendra plus particulièrement le beau mezzo rond et chaud d’Aude Extrémo (Maman et la Libellule), l’interprétation délicate et juste d’Elisa Cenni en Enfant mangé d’ennui et de solitude, le soprano brillant et moelleux de Julie Mathevet (le Feu et le Rossignol), l’humour canaille de Vladimir Kapshuk (l’Horloge et le Chat – finement inspiré du Rum Tum Tigger de Cats), sans que les autres soient en reste. Un beau spectacle, où l’humour et la nostalgie mêlées de l’œuvre de Ravel trouvent un ton juste.
C.C.