René Pape (Mefistofele), Joseph Calleja (Faust), Kristine Opolais (Margherita), Karine Babajanyan (Elena), Heike Grötzinger (Marta), Andrea Borghini (Wagner), Rachael Wilson (Pantalis), Joshua Owen Mils (Nerèo), Chœurs et Orchestre de l'Opéra d'Etat de Bavière, dir. Omer Meir Wellber, mise en scène : Roland Schwab (Munich, 6-11 novembre 2015).
DVD C Major 739208. Synopsis en français. Distr. DistrArt Musique.
Que faire de l'unique ouvrage achevé par Boito, sujet fascinant, musique surprenante, qui anticipe plutôt le Doktor Faust de Busoni qu'il ne se souvient de l'opéra romantique de Gounod ? Un drame moderne, répond un peu vite Roland Schwab, plaçant l'action dans un squat sinistre avec junkies et paumés, qui tournera au final en asile. Tout cela pour mieux oublier la direction d'acteurs qu'appellent pourtant sans équivoque les caractères campés par Boito, qui réfléchit ses personnages dans sa musique. La « réévaluation » envisagée par Roland Schwab fait donc long feu, qui oublie le Sabbat et Pâques pour tout engloutir dans un noir sans fond. Et la musique ? Omer Meir Wellber entend les audaces d'une partition qu'on peine à croire des années 1860, mais mesure ses effets, créant une tension progressive hélas en désaccord avec la vacuité de la scène. René Pape, inévitablement, met trop de noblesse à son Mefistofele, mais quel art, quel legato... qui cèdent pourtant la place au Faust de Calleja, timbre rayonnant tirant le rôle vers le pur ténor lyrique. La générosité de cette voix, l'élan de ses phrasés sont si irrésistibles qu'on ne lui en veut guère d'oublier un rien le spinto. Hélas, Kristine Opolais, aigus à l'arraché, fausse grande voix en désordre, maltraite « L'altra notte », paille de la représentation, alors que Karine Babajanyan fait sonner avec vaillance son Hélène de Troie. La soirée achevée, me prend une irrépressible envie de revoir le spectacle de Robert Carsen avec le Mefistofele autrement sulfureux de Samuel Ramey...
J.-C.H.