Apollo et Hyacinthus & Die Schuldigkeit des ersten gebots (dir. Josef Wallnig, msc. John Dew), Der Schauspieldirektor & Bastien und Bastienne (dir. Elisabeth Fuchs, msc. Thomas Reichert), La finta semplice (dir. Michael Hostetter, msc. Joachim Schlömer), Mitridate, re di Ponto (dir. Marc Minkowski, msc. Günter Krämer), Betulia liberata (dir. Christoph Poppen, réal. Stefan Aglassinger), Ascanio in Alba (dir. Adam Fischer, msc. David Hermann), Il sogno di Scipione (dir. Robin Ticciati, msc. Michael Sturminger), Lucio Silla (dir. Tomas Netopil, msc. Jürgen Flimm), La finta giardiniera (dir. Ivor Bolton, msc. Doris Dörrie), Il re pastore (dir. et msc. Thomas Hengelbrock), Abendempfindung & Rex tremendus (dir. Michael Hofstetter, msc. Joachim Schlömer), Idomeneo, re di Creta (dir. Sir Roger Norrington, msc. Ursel et Karl-Ernst Herrmann), Zaide / Adama (dir. Ivor Bolton / Johannes Kalitzke, msc. Claus Guth), Die Entführung aus dem Serail (dir. Ivor Bolton, msc. Stefan Herheim), Le nozze di Figaro (dir. Nikolaus Harnoncourt, msc. Claus Guth), Don Giovanni (dir. Daniel Harding, msc. Martin Kusej), Così fan tutte (dir. Manfred Honeck, msc. Ursel et Karl-Ernst Herrmann), Die Zauberflöte (dir. Riccardo Muti, msc. Pierre Audi), La clemenza di Tito (dir. Nikolaus Harnoncourt, msc. Martin Kusej).
DVD DGG/Decca 074 3902 (33 DVD). Distr. Universal.
En 2006, le Festival de Salzbourg fêtait le 250e anniversaire de la naissance de Mozart (1756) avec un projet fou : l'intégrale représentée de ses œuvres scéniques ou assimilées (assimilation parfois un rien forcée), soit 22 « opéras » où l'on compte, en marge des grands classiques (qui sont d'ailleurs tantôt « action théâtrale », « fête théâtrale », « comédie avec musique » ou « sérénade » en plus d'être opera seria, buffa ou singspiel), un « intermède latin » (Apollo et Hyacinthus), un « singspiel sacré » (Le Devoir du premier commandement) et une « action sacrée » (Betulia liberata, la seule d'ailleurs à être maintenue ici en version de concert). Après des parutions séparées, les labels DGG et Decca ont uni leurs forces en 2016 pour regrouper en coffret les captations vidéo de cet événement unique, dont l'intitulé est devenu entretemps Mozart 225 - commémorant désormais le 225e anniversaire de la mort du compositeur (1791) : étrange glissement qui perd le chiffre rond en préférant commémorer la mort plutôt que célébrer la naissance et souligner la date de parution plutôt que celle de réalisation...
Les chefs-d'œuvre du maître avaient été chroniqués en leur temps : une Zauberflöte pleine de fantaisie (Révérence dans L'ASO 236), le Così désenchanté des Herrmann (ASO 236 et 292), des Nozze singulières et pessimistes (ASO 241), une âpre Clemenza (ASO 270), un Mithridate aux plaisirs ambivalents (ASO 263 - Minkowski, Croft et Mehta sont miraculeux, quand la mise en scène est d'un clinique sans âme)... Minimalistes et ne nourrissant pas l'œil, les scénographies de Don Giovanni et Idoménée (ce dernier affichant le beau doublé Kozena/Harteros) ; plus jouissif Lucio Silla dont le face-à-face Massis-Saccà ne manque pas de panache.
On parlera ici plus volontiers des titres secondaires voire franchement marginaux, certains parfois complètement redessinés lors de soirées-concept plus ou moins intéressantes. Il y a certes des ratés : l'imagerie naïve, l'humour gaguesque et le chant parfois laborieux du Devoir du premier commandement peinent à convaincre, tout comme La finta giardiniera franchement laide à regarder ; malgré Adam Fischer, Ascanio in Alba est victime d'une mise en scène cheap et de chœurs erratiques, Damrau et Prina y sont même occultées par un mal canto généralisé que l'on retrouve chez les hommes du Sogno di Scipione, où une tentative de mise en abyme se voit bien pauvrement réalisée. La trilogie Irrfahrten (errance) conçue par Joachim Schlömer en trois soirées s'avère plus mentale que charnelle : entre froideur visuelle et jeu potache, La finta semplice ne trouve pas ses marques, abîmée en outre par un Fracasso d'écoute pénible ; Abendempfindung tresse une introspection de l'âme humaine par un chanteur (Ann Murray, un peu indurée), une actrice et un danseur, sans que l'alchimie ne fonctionne vraiment ; Rex tremendus confronte des extraits de Lo sposo deluso et de L'oca del Cairo, organisant un choc acoustique et visuel entre leurs partitions et leurs espaces de jeu - sans émotion.
En revanche, Apollo et Hyacinthus, avec sa mise en scène mi-baroque (face public, éclairage à la rampe), mi-fantaisiste (dans des costumes et perruques architecturés) ne manque pas de charme, défendu par une jolie réalisation vocale, et Il re pastore tire son épingle du jeu par sa pêche orchestrale et l'Alessandro de Kresimir Spicer. Quant à Bastien et Bastienne et Le Directeur de théâtre, ils sont entrelacés par les Marionnettes de Salzbourg dont l'esprit, la mobilité et la sensibilité incroyables - outre une belle générosité vocale - font mouche. C'est en fait l'un des moments les plus originaux du coffret : drôlissimes, l'invasion du plateau par les marionnettes des différents personnages de Mozart issus de ses autres opéras et réclamant de changer enfin d'emploi, ou bien la rivalité de deux postulantes au rôle de Bastienne éclatant dans le « Ich bin die erste Sängerin ! » du Directeur de théâtre, trio à mourir de rire tant il est chanté avec esprit et joué par ces poupées de bois avec une chair et un charme à fondre.
Un coffret alliant bonnes surprises et déconvenues, pour collectionneurs uniquement - les perles sont par ailleurs disponibles séparément.
C.C.