Igor Gorin (Igor), Consuelo Rubio (Iaroslavna), David Poleri (Vladimir), Boris Christoff (Galitski/Kontchak), Carol Smith (Kontchakovna), Richard Carl Knoll (Ovlur), Renato Cesari (Skoula), Mariano Caruso (Iérochka), Jeanne Diamond (la Jeune Polovtsienne). Chœur et Orchestre de l'Opéra de Chicago, dir. Oscar Danon (live 12 octobre 1962).

CD Immortal Performances IPCD 1044-3. Distr. Immortal Performances.

Pas de premier tableau du troisième acte, des coupures : c'était souvent le cas alors. Dommage, car Oscar Danon dirige en chef de théâtre, avec une grande fluidité, digne de figurer à côté des meilleurs. Le plateau, en revanche, est inégal. Boris Christoff fait du Boris Christoff, endossant l'insolence de Galitzki ou la grandeur de Kontchak : on peut détester, mais quelle présence ! David Poleri a des élans assez véristes et force ses aigus en Vladimir. Avec Consuelo Rubio, Iaroslavna devient une torche vivante, au bord de la rupture quand elle dépasse le haut-médium. L'opulente Carol Smith, elle, pâtit des coupures infligées à Kontchakova - la moitié du duo ! Igor Gorin, enfin, a parfois tendance à relâcher le phrasé au profit de l'expression, ce qui ne convient pas toujours au rôle d'Igor. Pas vraiment une « immortal performance », donc.

A vrai dire, l'intérêt de ce live au son souvent précaire ou brouillon vient d'ailleurs. C'est la première du Prince Igor à l'Opéra de Chicago et tout le monde chante en russe - le chœur patine d'ailleurs dans les passages rapides. La chorégraphie de Ruth Page s'inspire de celle de Fokine... et le danseur étoile s'appelle Rudolf Noureev, qui pour la première fois se produisait dans un opéra. Cela ne se voit pas, me direz-vous. Certes, mais cela s'imagine. Et il ne faut pas manquer le bonus : Gorin chante des « arie antiche » de Monteverdi, Vivaldi, Scarlatti... Si cela paraît aujourd'hui d'un autre âge, on ne peut rester insensible à la beauté du timbre, à la souplesse de l'émission, au galbe du phrasé - c'est ici, finalement, que se révèle la noblesse du chant de cet Américain originaire de Galicie, passé par le Conservatoire et la Volksoper de Vienne avant d'émigrer.

D.V.M.