Les Acteurs de l'opéra : Lucasz Meachem (Figaro), Lucy Schaufer (Susanna), Joshua Guerrero (le Comte Almaviva), René Rapier (Cherubino), Patti LuPone (Samira), Robert Brubaker (Bégearss) Guanqui Yu (Rosine), Brenton Ryan (Léon).
Solistes, Chœurs et Orchestre de l'Opéra de Los Angeles, dir. James Conlon (2015).
CD Pentatone PTC 5186538. Distr. Outhere.
La création de The Ghosts of Versailles sur la scène du Metropolitan Opera le 19 décembre 1991 fit sensation, et avec raison. La partition foisonnante mise au point par John Corigliano, dont la suractivité et les divers plans de lecture comme d'action dramatique ne sont pas sans évoquer le théâtre démultiplié des Soldats de Zimmerman, la modernité assumée de son langage et des moyens déployés - le compositeur recourt même au synthétiseur -, la palette des styles historiques employés sous la forme de pastiches ou pas, la versatilité de la syntaxe où se précipite toute l'histoire de l'opéra et les fastes d'une mise en scène qui a fait date (le spectacle a été filmé, le DVD existe) n'auraient pas suffi à lui assurer le triomphe si James Levine n'avait dirigé le tout avec un panache incroyable, emportant une distribution « all star » où paraissaient Teresa Stratas, Graham Clark, Hakan Hagegard, Marylin Horne, René Fleming et Gino Quilico.
Il aura donc fallu un quasi quart de siècle pour que ce chef d'œuvre se transporte de la côte Est à la côte Ouest : finalement James Conlon réussit à l'imposer dans le cadre de ses aventureuses saisons. La distribution qu'il aura réunie est brillantissime et l'on entend ici toute l'incroyable abondance d'idées d'une partition qui échappe à tous les genres. On sait l'œuvre sans cesse surprenante pour l'audience qu'elle ne manque pas de captiver, et de fait toute la salle s'esclaffe ou disparaît dans un silence hypnotique, preuve qu'elle fait toujours son effet. Mieux, Conlon dépasse les impressions de collage pour tout unir dans une folie dramatique où les chanteurs n'ont plus qu'à paraître : le Bégearss de Robert Brubaker n'a rien à envier à celui pourtant anthologique de Graham Clark, Patricia Racette succède dignement à Teresa Stratas, Marie-Antoinette plus affirmée mais par instant moins émouvante, et Patti LuPone ose après Marylin Horne une Samira plus finement campée, en fait absolument irrésistible - le personnage dépasse la caricature. Dans tout ce théâtre, le Beaumarchais de Christopher Maltman est insensé de présence.
Et maintenant, il nous faut l'image, car le spectacle réglé par Darko Tresnjak le mérite : il a tout saisi de cet opéra d'après la mort de l'Opéra.
J.-C.H.