CD Naxos 8.660337. Distr. Outhere.
Dans L'Enfant et les Sortilèges, Leonard Slatkin n'avait pas vraiment convaincu (lire ici). Il convainc encore moins dans L'Heure espagnole. Certes il offre de nouveau, avec ses musiciens lyonnais, une lecture scrupuleuse de la partition. Mais la pâte sonore est trop épaisse pour Ravel, qui appelle une interprétation moins enveloppée et plus analytique. Il manque surtout l'humour, l'esprit, le sel, les clins d'œil, le second degré, sans compter la gouaille coquine - rappelons que Ravel voulait ici « redonner vie à l'opéra-bouffe italien ». Cela semble même contaminer les chanteurs, impeccables au demeurant, qui témoignent de la belle santé de l'école française. Mais on aimerait des personnages plus croqués, plus drôles. Le Ramiro subtil de Marc Barrard, même un peu amati de timbre maintenant, devrait davantage montrer les gros bras du muletier. Non moins subtil le Don Iñigo de Nicolas Courjal, auquel aucune nuance n'échappe - ce qui n'est pas toujours le cas -, banquier assez jeune et assez vert là où on l'attend plutôt bedonnant et bouffon, sans doute le plus fidèle de tous aux sous-entendus des mots et des notes. En rupture avec une tradition de préciosité ridicule, Frédéric Antoun (Gonzalve) relève plutôt du ténor lyrique enflammé. Mariée au Torquemada un peu trop neutre de Luca Lombardo, Isabelle Druet campe une Concepción trop bon chic bon genre là où on la voudrait tellement plus canaille... Bref, c'est trop sérieux et l'on s'ennuie. En complément, le Don Quichotte à Dulcinée par un François Le Roux qui n'est plus que l'ombre grisâtre de lui-même, alors que Nicolas Courjal, par exemple, y eût été parfait. Les éditeurs, parfois, ont d'étranges idées.
D.V.M.