CD Lyrita REAM.2122. Livret unilingue anglais. Distr. Wyastone.
Provenant d'un enregistrement personnel que Richard Itter (1928-2014), fondateur de la compagnie de disques Lyrita, avait réalisé en 1956 à partir d'une retransmission de la BBC, cette version de Sir John in Love de Vaughan Williams a attendu 60 ans avant d'être commercialisée. Dans des conditions sonores très acceptables, elle nous permet notamment d'entendre le baryton Roderick Jones, qui fut Falstaff lors de la première représentation professionnelle de l'opéra au Sadler's Wells Theatre, en 1946, et dont le principal titre de gloire est d'avoir chanté Balstrode lors de la création mondiale de Peter Grimes en 1945.
Conçu entre 1924 et 1928, Sir John in Love a d'abord été donné au Royal College of Music de Londres en 1929. En 1912, alors directeur musical de la compagnie shakespearienne de Stratford-upon-Avon, Vaughan Williams avait déjà écrit une musique de scène pour Les Joyeuses Commères de Windsor dans laquelle il utilisait la célèbre mélodie Greensleeves, qu'il fait chanter à Mrs Ford dans son opéra, au moment où elle attend la visite galante de Sir John. Sur un livret qu'il rédige lui-même d'après la pièce originale dont il conserve la totalité des vingt personnages, il compose une partition qui comprend, outre Greensleeves, de nombreuses citations de chansons folkloriques. Loin de donner l'impression d'un collage, l'ouvrage s'avère au contraire attachant et dégage un agréable parfum de vieille Angleterre. Inutile toutefois de rechercher ici l'effervescence extraordinaire et l'orchestration étincelante du dernier chef-d'œuvre de Verdi : la comédie, chez Vaughan Williams, est infiniment plus sage que dans Falstaff et le rôle-titre, moins truculent. Parmi les moments les plus réussis, on retient le touchant duo entre Anne Page et Fenton au premier acte et la scène où Ford demande pardon à son épouse de l'avoir injustement soupçonnée d'infidélité.
L'interprète de Ford, la basse John Cameron, se distingue par la rondeur de son timbre et son expressivité, qui font ombrage au Falstaff plutôt terne de Roderick Jones. À l'exception d'April Cantelo, Anne Page tout à fait délicieuse, le reste de la distribution se situe globalement à un assez bon niveau, mais n'appelle aucun enthousiasme particulier, à l'image de la direction sans grand relief de Stanford Robinson. Pour une découverte de l'œuvre, on recommandera non pas ce document historique, mais la superbe version dirigée par Richard Hickox en 2000 et mettant en vedette Donald Maxwell, Mark Padmore et Laura Claycomb.
L.B.