DVD Dynamic 33764. Distr. Outhere.
Heureuse la province italienne qui peut s'offrir un tel plateau vocal presque exclusivement « national » dans une œuvre aussi exigeante. Certes, la Turandot de Daniela Dessì appartient à cette catégorie de sopranos qui, passée la cinquantaine, s'aventurent dans des rôles dramatiques pour lesquels elles n'étaient pas originellement taillées. Il faut avouer qu'après un démarrage où la voix paraît un peu sous pression - on croirait parfois entendre la Callas des années soixante -, elle maîtrise plutôt bien la tessiture et que, même si l'extrême grave fait défaut et que le vibrato est parfois un peu accusé dans l'aigu en force, elle donne à l'arrivée une image très crédible de la princesse de glace, grâce à un bel engament et un authentique talent d'interprète. La beauté du timbre et la franchise de l'émission jusque dans l'extrême aigu de Mario Malagnini - pour sa part, un vétéran du rôle - sont de grands atouts et lui valent des applaudissements à « scène ouverte » mérités pours ses deux airs ; mais l'interprète lui-même reste, à l'inverse de sa partenaire, assez monotone et peu expressif. Superbe la voix de basse noble du Timur de Ramaz Chikviladze - seul non-Italien de la distribution -, superlatif le Mandarin et excellent le trio des Ministres. A l'applaudimètre, la grande triomphatrice de la soirée reste la Liù d'une grande fraîcheur de timbre et d'une parfaite musicalité de Roberta Canzian.
D'où vient donc alors que cette production glisse un peu sur le spectateur ? C'est que la mise en scène reste terriblement conventionnelle, réitérant tous les poncifs d'une Chine de pacotille, et qu'elle n'a vraiment pour elle que la qualité de ses éclairages assez poétiques et d'assez jolis décors évoquant les marches du grand pavillon de la Cité interdite. Surtout, le statisme généralisé des scènes d'ensemble, que quelques malheureux mouvements chorégraphiques ne parviennent pas vraiment à animer, font rapidement naître un certain sentiment de routine. Ce qui sans doute pouvait suffire pour la représentation scénique manque un peu de présence dans le témoignage vidéo. La direction efficace mais sans grande surprise de Donato Renzetti, à la tête d'un ensemble choral et orchestral de bon niveau, ne révèle rien de nouveau dans la partition de Puccini et se contente de soutenir les chanteurs avec compétence.
A.C.