ONYX 4158. Distr. Harmonia Mundi.
Après une belle Fiancée vendue, Jiří Bělohlávek nous offre Dalibor, avec les mêmes - excellents - musiciens et choristes de la BBC. Cet opéra est à Smetana ce que Fidelio est à Beethoven. Mais Milada veut en réalité sauver l'assassin de son frère, dont elle est tombée amoureuse. Et Dalibor, lui, n'a fait que venger celui de son ami de cœur le violoniste Zdenek, auquel il ne cesse de rêver dans sa prison et qu'il est heureux de rejoindre dans la mort, avec Milada. Pas de fin heureuse ici : l'évasion échoue. Musicalement, un chef-d'œuvre, où la générosité de Smetana s'épanouit totalement, dans les mélodies comme dans l'instrumentation. Jiří Bělohlávek s'y trouve évidemment chez lui, faisant sonner l'orchestre comme un ensemble tchèque. Cette direction fluide et colorée excelle plus dans le lyrisme que dans l'épopée, sans doute plus évocatrice que théâtrale, surtout au début : le drame se noue ici progressivement. Hier Mařenka de La Fiancée vendue, Dana Burašová a la vaillance de Milada, mais atteint ses limites dans ce rôle beaucoup plus dramatique et peine parfois dans l'aigu, pas toujours impeccable. Le Dalibor juvénile de Richard Samek en a aussi, capable de nuancer, avec un bel air de la prison en troisième acte, à défaut du rayonnement d'un Blachut. Jitka, en revanche, exige une voix plus aguerrie que celle d'Alžběta Poláčková, dépassée, pour le coup, dans des passages comme le « Slava vam » du deuxième acte - le rôle est moins léger qu'il n'y paraît. Ivan Kusnjer n'endosse vraiment ses habits de Roi qu'au troisième acte et Jan Stava, s'il a la noble humanité du geôlier Beneš, manque parfois de stabilité et de profondeur, profondeur qui fait un peu défaut au sombre Budivoj de Svatopluk Sem. Cela dit, l'ensemble est homogène, chacun défend la cause avec conviction : un beau travail de troupe. Reste l'éternelle question de la concurrence pour ce concert donné au Barbican Center : les premières places reviennent toujours à Jaroslav Krombholc (par trois fois, la version de 1950 restant sans doute la référence) et à Václav Smetáček.
D.V.M.