Myrto Papatanasiu (Semiramide), Ann Hallenberg (Arsace), Josef Wagner (Assur), Robert McPherson (Idreno), Igor Bakan (Oroe), Julianne Geahart (Azema), Eduardo Santamaria (Mitrane), Charles Dekeyser (l'Ombra di Nino), Orchestre et Chœur de l'Opéra de Gand, mise en scène Nigel Lowery, dir. Alberto Zedda (Gand, 2011).
DVD Dynamic 33674. Distr. Outhere.

Notre peu d'enthousiasme devant le plateau réuni à Gand en 2011 (lire ici), sous la férule pourtant exemplaire de Zedda, allait-il se réchauffer par la grâce de la mise en scène de Nigel Lowery, souvent louée par les spectateurs in vivo ? Avouons notre déception : cette captation visuelle, loin de sauver la mise, aggrave les choses jusqu'à gâter même notre perception du rendu orchestral et à rendre insupportable ce que le chant présentait de travers à la simple audition.

Que le pétulant artisan d'un récent Candide de Bernstein ait choisi d'enfermer la mythique Babylone dans un décor de toiles peintes évoquant un palais en ruine de la péninsule arabique ravagée par les conflits que l'on sait, pourquoi pas? Encore que cet enracinement opportuniste de la fable de la mère incestueuse et meurtrière dans un réel aussi décalé appauvrisse l'œuvre plus qu'il ne l'éclaire. Comme d'ailleurs contribuent à vulgariser le propos d'un chef-d'œuvre aussi complexe et polysémique, ces chœurs en redingotes ridiculement alignés et pratiquant le langage des signes, ce chef des mages et sa valise, ce capitaine des gardes royaux avec son téléphone portable. Déjà mauvais ténor, Idreno, arrivant du Gange et débitant son air d'entrée en costume-cravate, raide comme un récitaliste, touche au ridicule, tout comme le dangereux prince Assur, boule rasée, t-shirt orange et lunettes rondes paraissant sortir d'une bande dessinée. Seule notre Reine peut faire à la rigueur oublier les carences de son chant par ses contorsions, ses robes moulantes et la blondeur de sa crinière, privilège refusé à la pauvre Hallenberg, Arsace dépourvu du moindre charisme, théâtral autant que vocal. Il ne manque plus que l'apparition, au dernier acte, de Ninus en mort-vivant émergeant de son tombeau, pour achever de faire sombrer Rossini dans le Grand-Guignol. Sans doute n'avons-nous pas saisi les motivations profondes de ce détournement. A chacun d'en juger.

J.C.