DVD Opera Spanga. Distr. Opera Spanga.
En 2014, la compagnie lyrique néerlandaise Opera Spanga fêtait son 25e anniversaire. La troupe et sa directrice artistique Corina van Eijk, dont le but est de « faire descendre l'opéra de son piédestal pour le rapprocher du cœur des gens », montaient alors Gianni Schicchi en août, avant d'en réaliser une version filmée. Elle ne s'imposera pourtant pas dans la vidéographie de l'ouvrage. D'une part, cet univers cinématographique qui joue volontiers de la trivialité stylisée nécessiterait un cast vocal sans défaut pour faire passer des effets qui, sinon, tombent à plat à force de sembler des pis-aller (les très gros plans, les regards-caméra, le sur-jeu outré des visages). Or l'équipe est loin de rendre hommage à la partition de Puccini (ici dans son orchestration réduite par Ettore Panizza) : Michailov manque de ductilité et de versatilité vocales, et autour de lui la famille Donati va du correct au fatigué, voire à l'insuffisant. D'autre part, un étrange parti-pris a transformé Rinuccio en Rinuccia (le docteur aussi change de sexe, mais c'est moins primordial). On ne sait s'il s'agit d'un militantisme façon « Schicchi pour tous », mais force est de constater qu'il se heurte à deux obstacles de poids. Pourquoi donc dédoubler cette « Rinuccia » en deux interprètes, dont l'une semble choisie seulement pour sa plastique et l'autre... chante aussi Nella ? Surtout : ne s'est-on avisé que si Puccini avait voulu composer pour un duo amoureux féminin, il n'aurait certainement pas associé deux sopranos (!) et encore moins à l'unisson (!!). On se retrouve donc avec un couple Rinuccia/Lauretta dont le piquant lesbien (la blonde glaciale et la brune latine) est inversement proportionnel à la crédibilité musicale. Le chef semble d'ailleurs suivre plutôt que mener, souvent lent ou prudent. Les curieux prêts à supporter la déception puccinienne jetteront un œil à la réalisation pour ses idées parfois toniques.
C.C.