Ana Quintans (Nerina), Carlos Mena (Arsindo), Joana Seara (Termosia), Fernando Guimaraes (Adraste), Càtia Moreso (Giano), Joao Fernandes (Mirenio), Os Musicos do Tejo, dir. Marcos Magalhaes (2013).
CD Naxos 8573380-81. Notice en anglais, pas de livret. Distr. Outhere.

 

En 2011, Les Musiciens du Tage avaient déjà ressuscité, du même compositeur et chez le même éditeur, un vaste opéra bouffe en trois actes, La Spinalba (1739). Que n'ont-ils débuté leur exploration des œuvres d'Almeida (ca 1702-ca 1755) par ce « scherzo pastorale » (ou cette sérénade) à six voix de 1729, dont les moindres exigences collent parfaitement à leurs moyens actuels ! Les quelques hésitations et faiblesses qui entachaient La Spinalba ont en effet presque disparu, deux ans plus tard - même si le ténor Guimaraes place trop souvent sa voix « dans le nez » et si le chant de la mezzo Moreso apparaît encore trop débraillé. Les autres interprètes, déjà entendus dans le disque précédent, s'avèrent excellents, de la soprano Quintans, dont le bas registre s'est enrichi, à la virtuose basse Fernandes, bien connue des baroqueux, en passant par une seconde soprano (Seara) des plus émouvantes. Mais c'est le nouveau venu qui nous vaut nos plus grandes émotions : sans sacrifier son élégance naturelle, le contre-ténor Mena, jouant en maître de ses belles notes de passage, campe un poignant protagoniste, que la direction de Magalhaes motive manifestement. Car le chef et l'ensemble baroque portugais ont aussi gagné en maîtrise et, surtout, en vigueur, nous offrant de dramatiques scènes d'ouverture et un « coup de théâtre » parfaitement senti (le très modulant arioso « Divinità del cielo », dans lequel l'héroïne s'offre à mourir pour son bien-aimé). Si le prétexte arcadien de cette pastorale n'offre qu'un mince intérêt (deux couples de bergers, séparés par un oracle mal interprété, seront finalement réunis), la musique vocale d'Almeida, une fois encore, s'avère plus homogène que celles de maîtres mieux connus (ses aînés Vivaldi et Caldara, par exemple, ou même son contemporain Hasse) : au fil de ces 18 morceaux (dont 12 airs), ses mélodies, toujours bien caractérisées et écrites pour la voix, coulent sans discontinuer, tandis que son instrumentation offre déjà toutes les séductions du « style galant » (bois colla parte, cors en harmonie, etc.). Il paraîtrait que deux partitions d'opéra d'Almeida, épargnées par le tremblement de terre lisboète de 1755, dorment encore dans les bibliothèques : vite, que les Musiciens du Tage nous les révèlent !

O.R.