Furio Zanasi (Orfeo), Arianna Savall (Euridice), Antonio Abete (Caronte), Daniele Carnovich (Plutone), Fulvio Bettini (Apollo), Montserrat Figueras (la Musica), Sara Mingardo (Messaggiera), Cecile van de Sant (Speranza), Adriana Fernandez (Proserpina), Mercedes Hernandez, Marilia Varga (Ninfa), Gerd Türk, Carlos Mena, Francesc Carrigosa, Ivan Garcia (Pastore, Eco, Spirito), La Capella Reial de Catalunya, Le Concert des Nations, dir. Jordi Savall (2002).
CD Alia Vox AVSA9911. Distr. Naïve.

 

31 janvier 2002. Jordi Savall et ses musiciens prennent possession de la fosse du Gran Teatre del Liceu en costumes d'époque, la scène dévoile des toiles peintes, et une machinerie inspirée du théâtre baroque règle la mise en scène de Gilbert Deflo déployée dans une scénographie inspirée par le Palazzo Ducale de Mantoue : on pourra en retrouver la subtile poésie en visionnant le DVD Opus Arte (chroniqué dans L'ASO n° 214) dont Aliax Vox publie ici la bande son. Livre-disque somptueux, qui reproduit des photographies du spectacle et enserre les deux CD dans une documentation précieuse et une mise en page raffinée.

Que reste-t-il de cet Orfeo sans l'image ? Tout, et même plus. On entend déjà les critiques : Furio Zanasi ne peut vocaliser « Possente spirto » comme Nigel Rogers et il n'aura pas les élans ni le timbre d'Eric Tappy, héros à l'antique chez Corboz. Non. Mais comment lui dénier l'art de toucher, la poésie des mots, la simplicité plus d'une fois bouleversante d'un récit ailé par le chant ? Savall compte le voyage aux Enfers avec plus de douceur que de terreur ; Caronte a beau protester, il ne peut résister aux suppliques du poète et plus encore aux accents rêveurs de harpe et de luth dont il l'endort. On entre dans un théâtre magicien et non plus en Hadès, comme dès l'acte I la sylve des bergers était pure Arcadie, Savall dessinant les paysages d'un pinceau tendre, restant idéalement à mi-chemin du madrigal et de la scène. Cet Orfeo à part, où Montserrat Figueras met son ardente Musica et Sara Mingardo sa Messaggiera tragédienne, prend par sa seule musique une place au parnasse du chef-d'œuvre de Monteverdi, juste à côté de ceux signés Garrido, Gardiner et Jacobs.

J.-C.H.