CPO 777 699-2 (2 CD). Pas de livret. Distr. DistrArt Musique.
Évoquant avec beaucoup de liberté le séjour du jeune Paganini à Lucques en 1801-1809 et ses brèves amours avec Élisa Bonaparte (alors princesse de Piombino), la délicieuse opérette de Lehár ne remporta aucun succès au moment de sa création, à Vienne, en 1925. La raison en est simple : le rôle-titre avait été conçu pour mettre en valeur la voix de Richard Tauber, alors indisponible. C'est seulement en janvier 1926, au moment de la reprise triomphale au Künstlertheater de Berlin, que le légendaire ténor allait permettre à l'œuvre de s'imposer au répertoire de l'entre-deux-guerres. Peu abondante, la discographie est dominée depuis 1977 par la version de Willi Boskovsky (EMI), où brillent les merveilleux Nicolai Gedda et Anneliese Rothenberger.
Remarquable chef lyrique ayant souvent dirigé l'opérette viennoise, Ulf Schirmer peut-il prétendre rivaliser avec son illustre devancier ? Sur le plan orchestral, assurément, car sa direction alerte confère le caractère à la fois effervescent et sentimental convenant parfaitement à ce type d'œuvre où la tristesse passagère cède vite la place au simple bonheur de vivre. La phalange munichoise et le chœur de la radio bavaroise offrent un support idéal à une distribution qui, à l'exception notable du personnage éponyme, s'avère excellente. Kristiane Kaiser est une princesse altière mais surtout profondément humaine, au chant délicat, suave et toujours agréable. De même, la soprano Eva Liebau, au timbre d'une grande fraîcheur, prête à la cantatrice Bella Giretti des accents très justes. Avec Martin Zysset, ténor léger qui campe le rôle de son amoureux Pimpinelli, elle forme un couple harmonieux. On ne peut malheureusement pas en dire autant du ténor Zoran Todorovich, Paganini à la voix de stentor qui dépouille ses airs d'une bonne partie de leur grâce. De son interprétation fort prosaïque se détache heureusement le fameux « Gern hab' ich di Frau'n geküsst », dont il réussit assez bien à exprimer l'enivrante volupté. Ne pouvant occulter le souvenir obsédant de Gedda, Todorovich est le maillon faible de cet enregistrement qui possède par ailleurs des atouts dignes d'éloges.
L.B.