Kate Aldrich (Léonor), Yijie Shi (Fernand), Ludovic Tézier (Alphonse), Giovanni Furlanetto (Balthazar), Marie-Bénédicte Souquet (Inès), Alain Gabriel (Don Gaspar), Dong Jin Ahn (Un seigneur). Chœur et Orchestre du Capitole de Toulouse, dir. Antonio Allemandi, mise en scène : Vincent Boussard (Toulouse, 2014).
DVD Opus Arte OA 1166 D. Distr. DistrArt Musique.

 

Beau décor stylisé de Vincent Lemaire, avec les arcades de Saint-Jacques de Compostelle ou de l'Alcazar de Séville. Beaux éclairages aussi de Guido Levi, comme les couleurs des costumes rutilants dessinés par l'inventif Christian Lacroix - souvent superbes, parfois surprenants ou carrément incongrus : censée arriver en « robe sainte » de novice, Léonor semble sortir d'un défilé de collection... certes, le haut ressemble symboliquement à une camisole. Mais cette Favorite toulousaine pâtit de la production au premier degré d'un Vincent Boussard décevant. Il réussit quelques moments par la tension qu'il y installe, quand par exemple Alphonse, défiant Balthazar, prend Léonor de force devant lui, ou quand les courtisans, tels un essaim de corbeaux noirs, se moquent de la bonne fortune de Fernand. Cela ne rachète pas la platitude de l'ensemble, où l'on chante trop souvent sans presque bouger, face au public. Comme si la direction d'acteurs n'était qu'un simple rouage d'une lecture essentiellement plastique.

Roberto Allemandi, pas toujours cohérent dans la gestion des tempos, pas toujours très subtil non plus, ne manque cependant ni d'énergie ni de lyrisme. Bonne chanteuse, probe et sincère interprète, Kate Aldrich n'est pas pour autant le grand mezzo de Léonor, même si elle en assure la tessiture. Manquent le style et la dimension tragique, l'intimité avec le belcanto : la Favorite fait plutôt bonne fille dépassée par un destin trop lourd. Avec un air de page plus que de vainqueur des Maures, le jeune Chinois Yijie Shi assure aussi, crânement même, jusqu'à rétablir « Oui, ta voix m'inspire ». Pas tout à fait belcantiste non plus : l'émission, un peu nasale, semble trop souvent sous tension, il a tendance à claironner ou à pleurer ses notes dans les moments où le cœur déborde. Alphonse vraiment royal, à la clémence ambiguë, c'est donc Ludovic Tézier qui incarne le grand style, bien que l'air des jardins de l'Alcazar trahisse une certaine raideur. Il fait évidemment beaucoup d'ombre au Balthazar de Giovanni Furlanetto, qui attend le dernier acte pour s'empêtrer un peu moins dans sa ligne et dans la prosodie française.

Il fallait remplacer le seul DVD de La Favorite recensé, quasiment impossible à regarder à cause de la captation - malgré Alfredo Kraus et Fiorenza Cossotto. C'est par défaut que celui-ci s'impose comme version d'attente. Avec un avantage : il propose l'original français de l'opéra de Donizetti.

D.V.M.