Federico Benetti (Enrico VIII), Marta Torbidoni (Anna Bolena), Laura Polverelli (Giovanna Seymour), Dionisos Tsantinis (Lord Rochefort), Moisés Marín García (Lord Percy), Martina Belli (Smeton), Carlo Allemano (Hervey), Belcanto Chorus & Europa Galante, dir. Fabio Biondi, mise en scène : Cesare Scarton (Rieti, sept. 2013).
Dynamic 37687. Distr. Outhere.

 

Pour le Reate Festival 2013, Fabio Biondi décidait de monter une version alternative d'Anna Bolena, différente de celle de la création (1830) habituellement entendue. Pourquoi pas... à condition d'avoir les moyens de sa politique.

Proposer une autre Anna, oui, mais pourquoi une version bâtarde mixant les révisions orchestrales entendues à Rome en 1833 et d'autres, formelles et vocales, présentées à Milan en 1840 ? Chercher de l'inédit, peut-être, mais pourquoi du côté d'une partition révisée par contrainte, en raison d'un cast moins brillant que celui de la création - en 1840, Amalia Schütz-Oldosi (au lieu de la Pasta...) nécessite des abaissements, et Giovanni Basadonna (au lieu de Rubini !) des simplifications - ? Justifier cette Anna devenue plus centrale - et donc plus « mature » face à Giovanna - par un rapprochement de situation avec l'abandon de Norma, elle aussi supplantée par une plus jeune femme dans le cœur de son amant, certes, mais c'est oublier le timbre mature-et-demi de la Giovanna de Laura Polverelli, chargé d'un vibrato débordant et qui décrédibilise ici les intentions du chef ! Se pencher sur une partition à l'orchestre allégé et éclairé de nouvelles couleurs (avec notamment un fortepiano concertant), d'accord, mais pourquoi ne pas y saisir l'occasion d'une ligne tendue, âpre, et laisser ainsi les tempi fluctuer sans cohérence, souvent dans le sens de l'endormissement ?

Autour de ce projet « sur le papier » un rien bancal, la production ne sauve rien : scénographie façon premier Ottocento, pas laide mais sans tension intérieure ni vraie direction d'acteurs ; côté plateau, Anna honnête mais sans splendeur de Marta Torbidoni et, outre la Giovanna décevante déjà évoquée, un Smeton sans profondeur et au passage problématique (un comble pour une mezzo !), un Enrico (à la création, c'était le brillant rossinien Filippo Galli !) et un Percy éprouvants à entendre, largement en-dessous du bel canto minimal requis.

Bref, l'aventure d'une Anna « alternative » tourne à la « sous-Anna Bolena ». Gageons que Donizetti chérissait plutôt le souvenir du cast royal - et de la version souveraine - de 1830.

C.C.