DVD Cmajor 717208. Distr. Harmonia Mundi.
L'affiche promettait, on doit déchanter. D'abord la régie sans imagination de Florentine Klepper fait long feu, qui surjoue le bal du II façon divertissement fantomatique, avec Fiakermilli dominatrice (évidemment with cravache) et assemblée en frac mimant des applaudissements silencieux et se ruant sur une odalisque en massepain. Décors glaçants, direction d'acteur convenue, dramaturgie pâlotte, on oublie la scène.
Hélas, il est trop tard pour les futurs mariés : Thomas Hampson parle un rôle qu'il faut chanter partout avec intention et dans la profondeur d'un timbre qu'il n'a plus. London, Uhde, Fischer-Dieskau - Hampson prend quelques accents à ce dernier - ont marqué un caractère entre hobereau et amoureux soupçonneux, que le baryton américain veut trop noble. Touchante souvent, Renée Fleming n'est plus du tout la jeune fille volontaire que campaient Della Casa ou Janowitz, mais une Maréchale. On passe souvent outre pour guetter telle inflexion de la voix, telle phrase qui tombe si juste, tel sourire dans le timbre. Du moins l'esprit y est. Les comprimari forment en revanche une troupe finement appariée : Jane Henschel, en deux gestes, campe une tireuse de carte qui crève l'écran ; la Benackova ose une Adelaïde plus séduite par les prétendants de sa fille que soucieuse des frasques financières de son mari ; Albert Dohmen joue un Waldner pusillanime à souhait. Mais les choses de gâtent avec la Fiakermilli de Daniela Fally, fâchée avec la justesse et pas en reste pour la vulgarité. On ne regrette pas trop que la coda de son air soit coupée.
Peu à peu, l'intérêt se reporte sur le couple Zdenka-Matteo : Daniel Behle est magnifique de sentiment, d'élan, de timbre, et Hanna-Elisabeth Müller, subtile dans le travestissement. C'est bien vu, et ce sera l'essentiel d'une soirée oubliable malgré la sonorité si inattendue de la Staatskapelle qui donne tout à entendre du foisonnement orchestral de Strauss. La direction de Christian Thielemann, pourtant rompu à l'œuvre, est parfois brouillonne : le tonitruant prélude du troisième acte, dirigé sans flamme, manque souvent de prendre l'eau.
Rien de nouveau pour Arabella en vidéo : restez-en à Solti avec Janowitz et Weikl, kitsch de décors et de costumes mais si juste de ton et de style, filmé par Otto Schenk. Et si vous voulez l'Arabella de Fleming, préférez-la dans le spectacle de Götz Friedrich à Zurich (Decca).
J.-C.H.