Diana Damrau (Lucia), Joseph Calleja (Edgardo), Ludovic Tézier (Enrico), Nicolas Testé (Raimondo), David Lee (Arturo), Marie McLaughlin (Alisa), Andrew Lepri Meyer (Normanno). Münchener Opernorchester und Chor, dir. Jesús López Cobos (live 2013).
CD Erato 0825646219018. Distr. Warner Music.

 

Sous prétexte d'édition originale dans le ton initial de fa majeur, Jesús López Cobos, auteur de la révision et chef superficiel, confiait en 1976 le rôle de Lucia à Montserrat Caballé pour ce qui fut le ratage le plus flagrant de la discographie. Elaguer cet emploi mythique des interpolations virtuoses d'une certaine tradition - y compris celles de l'Air de la folie écrites par la Marchesi pour Melba - était satisfaisant pour l'esprit mais, tout compte fait, assez frustrant. A preuve, la réintroduction par le chef desdites pyrotechnies dans le présent enregistrement, alors que l'on s'en tient par ailleurs aux tonalités de l'Urtext. Cela étant, d'une intégrale à l'autre, l'interprète principale demeure le point faible de l'entreprise. Malgré les qualités vocales et artistiques qu'on se plaît à lui reconnaître, Diana Damrau s'égare dans ce rôle, sans que la folie suffise à justifier ses errements vocaux et stylistiques. La voix a certes plus de consistance que celle des serinettes germaniques que moquera un certain Verdi, mais la chanteuse ne trouve que très rarement le juste équilibre des forte/piano et, plus généralement, du phrasé donizettien, plus attentive aux mots qu'à la ligne. La manière dont, à la reprise de la cabalette « Quando rapito », elle pousse un cri de chapon qu'on égorge, est d'un grotesque anthologique. Le dialogue avec l'harmonica de verre de la légendaire Folie, mieux négocié, ne suffit pas à compenser ces outrages. Tézier, dont on attendait sans doute trop, offre plus de virilité - un soupçon engorgée - que de souplesse et de style, plus obnubilé lui aussi par le texte que par le chant d'école. On se réjouit que le compositeur ait dédié l'ouvrage au ténor Duprez en écoutant l'admirable prestation de Calleja. Timbre, hauteur d'émission, subtilité du legato et des nuances, juvénilité : un Edgardo sans rival à ce jour qui, à lui seul, justifie qu'on se procure cette captation live, mixage de concerts donnés à Munich en juillet 2013.

J.C.