LA MASCOTTE Audran
Michel Dens (Pippo), Nadine Renaux (Bettina), Liliane Berton (Fiametta), Albert Duvaleix (Laurent XVII), Claude Devos (le prince Fritellini), Denise Challan (Un page), Linda Felder (Un page), René Hérent (Rocco), Jacques Pruvost (le sergent Parafante). Orchestre Jules Gressier, chœur Raymond Saint-Paul, dir. Jules Gressier (1958).
Robert Jysor (Pippo), Hélène Regelly (Bettina), Albert Duvaleix (Laurent XVII), Maurice Gillard (Rocco), Pierre Hiegel (narrateur). Orchestre et Chœur du Théâtre de la Gaîté-Lyrique, dir. Paul Minssart (1961).
MAM'ZELLE NITOUCHE Hervé
Albert Duvaleix (Célestin), Germaine Roger (Denise), Joseph Peyron (le Vicomte), Claude Devos (Loriot). Orchestre Marcel Cariven, Chœur Raymond Saint-Paul, dir. Marcel Cariven (1954).
BnF Collection Sonore, sur les plateformes de diffusion en ligne. Distr. Believe Digital.


Ces trois titres font partie de la collection sonore de la Bibliothèque nationale de France que l'institution, en partenariat avec Believe Digital et Memnon Archiving Services, a entrepris de diffuser auprès d'un vaste public. Le colossal travail de numérisation durera sept ans et permettra à terme de mettre en ligne le contenu sonore d'à peu près 200 000 disques. Au sein de ce catalogue d'une richesse inouïe, voici deux opérettes des années 1880 qui furent enregistrées entre 1954 et 1961. La préciosité est certes au rendez-vous, phalanges orchestrales et chœurs s'avèrent assez malingres et plusieurs interprètes sont bien davantage des diseurs que des chanteurs lyriques, mais pourquoi bouder son plaisir devant tant de bonne humeur ?

Sur le plan du confort sonore, de la direction et de la beauté vocale, la version Gressier de La Mascotte emporte aisément la palme. Michel Dens est ici un Pippo d'une grande classe, au chant raffiné et à la diction d'une clarté suprême. Si Nadine Renaux est charmante en Bettina, notamment dans le désopilant duo « J'aime bien mes dindons », c'est surtout la délicieuse Fiametta de Liliane Berton à la voix d'une grande fraîcheur qui domine la distribution féminine. La version Minssart, quoique plus récente, souffre d'une prise de son très réverbérée et de nombreuses coupures, dont les plus conséquentes sont celles des rôles de Fiametta et de Fritellini. Pour rendre compréhensible une intrigue ainsi charcutée, on a ajouté quelques dialogues et de brèves interventions d'un narrateur entre les différents extraits de l'œuvre. À l'inverse de Michel Dens, Robert Jysor campe un Pippo délibérément fruste, ce qui confère à ce berger un caractère davantage volontaire, qui s'accorde toutefois assez bien avec la Bettina d'Hélène Regelly. Présent également dans la version Gressier, l'acteur Albert Duvaleix est un Laurent XVII truculent, dont les minces ressources vocales plombent cependant l'interprétation.

On le retrouve aussi dans Mam'zelle Nitouche, où il tient le rôle de Célestin, alter ego du compositeur Hervé qui jouait de l'orgue dans un couvent le jour et dirigeait ses opérettes le soir... Encore ici, ce que l'on gagne en alacrité, on le perd sur le plan musical. La Denise (alias Mam'zelle Nitouche) de Germaine Roger chante très pointu, mais ses aigus faciles et surtout sa belle espièglerie nous la rendent malgré tout attachante. De même, Joseph Peyron et Claude Devos possèdent de petites voix légères dont ils usent néanmoins avec intelligence et qui conviennent bien aux rôles du vieux vicomte et de Loriot. En somme, ces trois enregistrements reflètent un art du chant certes suranné, mais constituent toutefois de précieux témoignages d'un répertoire bien négligé aujourd'hui et dont il importe de préserver la mémoire.

L.B.