27 CD Erato 0825646364879. Distr. Warner Music.
Vous débutez une collection ramiste ? L'essentiel est ici, vous pourriez presque vous en contenter. Pour composer cette somme en 27 CD, élégamment reliée mais privée de tout texte (ou presque), Erato a su piocher dans son formidable fonds mais aussi, quand il le fallait, emprunter aux copains de chez Warner.
Tout n'est pas d'une égale qualité. Les réussites transcendantes (Les Boréades d'un souffle, d'une classe folle de Gardiner, à jamais indépassables) côtoient quelques ratées (le Zoroastre mollasson de Christie, sabordé par son « méchant », l'indéfendable Nathan Berg, et surpassé de loin par l'intégrale de Kuijken, chez DHM). Mais même les titres les plus discutables ont ici leurs raisons d'être. Prenez le Dardanus tant décrié de Leppard, 1980 (partition tripatouillée, orchestre pâteux, chœur inécoutable, direction kitsch) : n'affiche-t-il pas le plus altier des Isménor (José van Dam) et un rôle-titre (Georges Gauthier) des plus attachants ?
La liste des cinq grandes tragédies se voit complétée par l'excellent Hippolyte de Christie (qui, à égalité avec celui de Minkowski chez Archiv, tient la tête de notre discographie) et le fulgurant Castor d'Harnoncourt, venu du catalogue Teldec et heureusement préféré à celui, trop tiède, de Farncombe, pourtant paru chez Erato. Plusieurs gravures s'imposaient de par l'absence de concurrence, mais pas seulement : nul ne voudra se priver des grâces langoureuses d'Hébé (Christie), ni des soulèvements belliqueux de Naïs (McGegan). C'est à ce dernier chef qu'échoit aussi l'une des partitions les plus populaires de Rameau : Pigmalion - certes servi avec plus de vigueur par Leonhardt (DHM) mais qui trouve en Michael Goldthorpe un protagoniste fort convaincant, faisant presque jeu égal avec John Elwes. Minkowski est représenté par deux albums délicieux : la meilleure Platée du marché et une sélection scintillante, enchantée mais purement orchestrale, issue des Surprises de l'Amour (dont une très belle intégrale due à d'Hérin est entre-temps parue chez Glossa).
Reste l'éternel problème des Indes galantes, ouvrage protéiforme souvent abordé, presque jamais réussi. La même année (1973), Malgoire, à la tête de sa balbutiante Grande écurie, et Paillard, accompagné de son (trop gros) Orchestre de chambre (sur instruments modernes), s'attaquent à l'œuvre : le premier n'a hélas jamais été réédité (CBS) ; le second se retrouve ici. Ses points forts ? Une édition complète et une distribution de haut niveau, bien qu'éprouvée par le diapason à 440 hz (Jennifer Smith, Philippe Huttenlocher, John Elwes et Louis Devos en tête). Ses points faibles ? Des instruments claironnants et privés de chaleur, une lecture figée, pompeuse, monotone. Ces Indes pesantes sont surtout là pour compléter le coffret - mais rappelons que leurs rivales (par Christie ou Reyne) ne nous ont pas davantage convaincu...
O.R.