Marc Kugel (Stromminger), Susanna von der Burg (Wally), Paulo Ferreira (Hagenbach), Bernd Valentin (Gellner), Susanne Lengbein (Walter), Kristina Cosumano (Afra), Johannes Wimmer (Il Pedone). Chœur du Landestheater d'Innsbruck, Orchestre symphonique du Tyrol, dir. Alexander Rumpf, mise en scène : Johannes Reitmeier (Innsbruck, 2013).
Capriccio ORF C9005. Distr. Abeille Musique.


Le rapport avec une nature à la fois amie et hostile, le drame psychologique, la dimension sociale... il y a de quoi faire avec La Wally. Eliminant ou réduisant aux costumes le pittoresque tyrolien, l'intendant du Landestheater d'Innsbruck Johannes Reitmeier propose une synthèse. La stylisation se mêle au réalisme, dans un décor unique et pivotant où le bois des chalets s'oppose à la blancheur de la glace, où la pénombre, au début et à la fin, ouvre la porte au fantastique : d'horribles yétis cornus remplacent « le groupe lugubre des fées des blancs glaciers » et, plus que l'avalanche, tuent Hagenbach. Mais la production pèche par une direction d'acteurs d'un naturalisme sommaire, ce qui dessert beaucoup les deux protagonistes, déjà peu crédibles physiquement.

Leur prestation vocale, de surcroît, ne transcende pas les insuffisances de leur jeu. Timbre assez ingrat, Susanna von der Burg, étoile du Landestheater, est plus solide que subtile, très investie en tout cas dans son rôle d'amazone tyrolienne farouche et sacrificielle. Paulo Ferreira, en revanche, n'assume la vaillance de Hagenbach qu'au prix d'aigus forcés et de phrasés trop bruts. Son rival malheureux, le Gellner de Bernd Valentin, belle voix de baryton, atteint parfois ses limites dans un rôle pas moins tendu. Le reste de la distribution révèle une troupe homogène, dominée par le Walter adolescent de Susanne Langbein. Mais La Wally, au carrefour de l'Allemagne et l'Italie, reste aussi un opéra de chef, appelé à réaliser la difficile synthèse entre des inspirations et des influences diverses : à défaut de se montrer tout à fait à la hauteur des enjeux d'une écriture raffinée, Alexander Rumpf, le chef maison, tient bon les rênes de son orchestre et révèle un efficace sens du théâtre.  

Rien d'idéal donc dans cette Wally venue de son Tyrol, mais du bon artisanat, plutôt une version d'attente... et de quoi nous rappeler que le drame lyrique de Catalani ne se réduit pas au fameux « Ebben ?... Ne andrò lontana » popularisé par le film Diva de Jean-Jacques Beineix.  

D.V.M.