Brilliant Classics 94869 (2 CD). Distr. Abeille Musique.
László Hunyadi est le premier opéra important de Ferenc Erkel (1810-1893), sombre histoire où le héros, en butte à la vindicte politique et amoureuse du roi László V, finit sur l'échafaud. C'est aussi le premier grand opéra national hongrois, dont la création en 1844 marque une date dans la musique du pays. Cela dit, le chef-d'œuvre d'Erkel reste Bánk Bán, sur un livret du même Béni Egressy. Malgré la touche nationale, l'incontournable Danse hongroise du troisième acte, László Hunyadi reste très tributaire des modèles français et italiens, en particulier dans la structure et la répartition des tessitures ; les personnages pourraient être aussi davantage caractérisés - comme la mère du héros, Erszébet, qui a la vision prémonitoire de son fils décapité. Un opéra très bien fait au demeurant, témoignage d'un talent avéré mais n'ayant pas encore atteint sa pleine maturité. Le genre d'œuvre que l'on doit confier, pour qu'elle marque, à une distribution d'exception. On ne la tient pas ici : le niveau reste moyen, sous la direction platement efficace de Domonkos Héja. Les chanteurs manquent d'intimité avec le style de l'époque, notamment pour l'agilité. On sent par exemple les dames à la peine dans les cabalettes, Beatrix Fodor réussissant mieux la scène finale même si elle y reste trop réservée, Erika Miklósa ne chantant pas toujours juste les notes les plus aiguës de Maria, la fiancée disputée. Le Roi de Dániel Pataky a la ligne un peu plébéienne et Attila Fekete incarne un László plus vaillant que subtil, tandis que le Gara de Gábor Bretz a la noirceur débraillée. Il faudrait réécouter les deux anciennes versions Hungaroton, signées Adam Medveczky (1977) et Janos Kovács (1985). Quelques mois après Le Roi Etienne (dir. Csányi, CD Naxos), Erkel se rappelle en tout cas à notre bon souvenir.
D.V.M.