Richard Troxell (Galilée âgé), Lindsay Ohse (Maria Celeste / Duchesse Christina), André Chiang (Galilée jeune), Nicholas Nelson (Urbain VIII, Simplicio, Cardinal Barberini), The Portland Opera Orchestra, dir. Anne Manson (2012).
CD Orange Mountain Music 0091. Livret en anglais uniquement. Distr. Socadisc.

Le risque n'est pas mince, avec les opéras historiques, de voir une trame chronologique quelque peu didactique se substituer à une véritable dynamique dramaturgique. En dépit de sa chronologie à rebours, le Galileo Galilei composé par Philip Glass au tournant du millénaire n'échappe pas à cet écueil. Même le sujet - l'Inquisition, l'accusation d'hérésie, le reniement forcé de théories visionnaires et, plus généralement, le rapport entre science et religion - engendre un propos univoque et bien plat.

Face à un matériau musical sans surprise, fait de tics érigés en style, les aficionados du compositeur se sentiront chez eux. Les autres auront de fortes chances d'être vite lassés par l'homophonie systématique, les arpèges généralisés, les enchaînements défraîchis d'accords parallèles, une orchestration grevée par des doublures creuses et une registration cramponnée au médium qui réussit à rendre aussi ternes, sans discrimination, toutes les familles instrumentales. Trop directement déduites d'une substance harmonique très pauvre, les lignes vocales ont peu de relief et semblent en outre bien souvent écrites sans souci de la prosodie ni de l'élan de la phrase.

On aimerait tromper le désarroi dans l'écoute contemplative des voix elles-mêmes, mais il faut d'abord en passer par le ténor débordant de Richard Troxell (sc. 1), son défaut d'élocution et ses aigus fatigués (sc. 2), avant de pouvoir enfin apprécier la belle consistance de baryton-basse de Nicholas Nelson, à condition toutefois de faire abstraction du climat musical de péplum caricatural qui baigne sa scène. Plus convaincant que Maria Celeste (Lindsay Ohse) et son vibrato démesuré, que le scribe tout droit sorti d'une comédie musicale (sc. 4), le Galilée rajeuni de la seconde partie - curieusement confié à un baryton - amène une fluidité salvatrice (André Chiang).

Les ostinati - aux maracas, aux cuivres - sont simplistes et dénués de finesse, tout comme le tango indigeste de la sc. 6 ; les courtes sections chorales hésitent entre vacuité de la polyphonie et, lors du finale, « da da - da » syncopés dignes des plus grandes heures du Muppet Show. Pour couronner le tout, l'« opéra dans l'opéra » de cette scène 10 fonctionne très imparfaitement, faute d'une rupture stylistique qui ne se borne pas au basculement dans un style pompier passablement grotesque. On ne s'arrêtera pas au petit arrangement avec l'histoire qui offre le prétexte à cette ultime scène : l'opéra auquel assiste Galilée enfant, composé par son père Vincenzo Galilei, n'a jamais existé.

P.R.