HD DVD Opus Arte OA 1134 D. Distr. DistrArt Musique.
Sans doute la belle équipe réunie ici, dans une production classique et élégante, fonctionnait à plein dans la salle. Mais la captation vidéo appuie en fait les défauts des uns et des autres - Norina trop forcée et surjouée de Danielle de Niese, plus mégère que fine mouche, Ernesto engorgé d'Alek Shrader - comme l'artifice des lumières, qui peinent à aviver une scénographie certes joliment pastel mais un rien morne dans ses teintes de gris-violine. L'oreille et l'œil sont pourtant à la fête avec le Pasquale de Corbelli - dont le grain de folie pourrait toutefois être encore plus libéré - et le Malatesta inhabituellement jeune et roué de Nikolay Borchev, dont la complicité sensuelle avec Norina donne à l'opéra buffa de Donizetti de nouvelles implications pimentées... Corbelli et Borchev, dans leur sillabando magistral et intrinsèquement dément, sont en tout cas au rendez-vous de la magie inquiète de cette partition, de même que la direction d'Enrique Mazzola, que l'on sent amoureux de sa poésie et de ses singularités. A ce titre, le finale secondo est un moment de grâce : Pasquale, défait, est emporté dans le lent vertige du Quatuor aux lenteurs crépusculaires, alors que tourne, en fond de décor, un chœur de Serviteurs-Spectateurs mondains et glacés. Car la mise en scène de Mariame Clément, si elle laisse trop les protagonistes à un jeu académique et appuyé, n'en possède pas moins des charmes et des justesses troublants, et ce dès l'Ouverture où valsent déjà la tournette et ses chausse-trapes. De même, le rôle « absurde » et distancié du chœur dans l'ouvrage est réinterprété selon une moquerie vive, une méchanceté presque : cette assemblée de « petits marquis » poudrés et fardés démultiplie des faces à la Valmont et Merteuil. L'image est saisissante, mais Don Pasquale est trop sympathique pour la laisser empiéter sur sa conclusion bon enfant - retournant d'ailleurs à un académisme banal. Si cette production ne bouscule pas la vidéographie de Don Pasquale, elle n'en demeure pas moins attachante, ne serait-ce que pour ces moments fugitifs où le buffa se dissout dans un néant stellaire, ici superbement exprimés. Deux ans après la création (1843), Donizetti serait réduit au silence par la maladie puis la folie...
C.C.