Joyce DiDonato (Maria Stuarda), Elza van den Heever (Elisabetta), Matthew Polenzani (Leicester), Matthew Rose (Giorgio Talbot), Joshua Hopkins (Cecil), Maria Zifchak (Anna). Ch. et Orch. du Metropolitan Opera, dir. Maurizio Benini, mise en scène : David McVicar (19.I.2013).
DVD Erato 463203 5 6. Distr. Warner Music.

Jusque-là dominée par la production de Milan 2008 (DVD ArtHaus), la vidéographie de Maria Stuarda compte désormais, avec cette captation new-yorkaise, une référence de premier plan. C'est bien simple : tout, ici, satisfait l'oreille comme l'œil, le goût du théâtre comme celui de l'authenticité stylistique.

La production de David McVicar - après Anna Bolena, montée avec Netrebko, et avant Roberto Devereux pressenti pour 2015-2016 - ne cherche pas à forcer l'Histoire, et plonge sans façon dans l'époque élisabéthaine. Simplement, elle le fait par le biais de costumes aussi raffinés que précieux, de décors aussi expressifs qu'épurés : aucune surcharge ici - de celles qu'on craint parfois sur la scène du Met -, aucune illustration pesant sur l'imagination à force de la contraindre en l'explicitant. La scénographie de John Macfarlane a du goût, un sens éclatant de la couleur (quel rouge !), de l'antiphrase (le parc de Fotheringay, dessiné en squelettique forêt hivernale), du détail intériorisé (ces cheveux vieillis cachés sous les perruques d'apparat...). Le tout réussit même, lors des premières scènes, à redonner à l'immense plateau du Met une vie et un nerf dignes d'un théâtre de tréteaux shakespearien. En adéquation parfaite avec la direction vive et fiévreuse de Maurizio Benini, l'image contribue ainsi à faire jaillir tout le suc pré-verdien du Prélude. Et tout du long, une direction d'acteurs fouillée, sans concession à la routine ou au gigantisme du lieu, fait évoluer de vrais personnages individualisés.

Si Milan offrait, en 2008, deux reines de haut rang avec Mariella Devia et Anna-Caterina Antonacci, New York dispose ici d'une Maria Stuarda d'excellence : Joyce DiDonato suspend la salle à ses lèvres dès la poésie mélancolique de son premier air, enthousiasme par son belcantisme qui sait la vaillance comme le délié, dessine à chaque instant le flux des émotions de son personnage, mezza voce et accents pénétrés à l'appui. En comparaison, l'Elisabetta d'Elza van den Heever affiche une solide technique et un style également châtié, mais pâtit d'un timbre intrinsèquement peu séduisant - froid et assez dur. Matthew Polenzani, malgré quelque fragilité, cherche en permanence la nuance, la courbe et l'élégance : on salue ce respect d'une école si longtemps oubliée et qui, en évitant aussi bien les excès di petto que les dangers de mièvrerie du falsetto, parvient à trouver la juste mesure du ténor donizettien - et, par conséquence, celle du personnage, enfin attachant. Matthew Rose est un Talbot un peu monolithique, tandis que Joshua Hopkins parvient à faire de Cecil, personnage secondaire, une présence incontournable : une réussite à saluer sans modération.

C.C.