Myrto Papatanasiu (Semiramide), Ann Hallenberg (Arsace), Josef Wagner (Assur), Robert McPherson (Idreno), Igor Bakan (Oroe), Julianne Geahart (Azema), Eduardo Santamaria (Mitrane), Charles Dekeyser (l'Ombra di Nino), Orchestre et Chœur de l'Opéra de Gand, dir. Alberto Zedda (live 2011).
CD Dynamic CD 674 /1-3. Distr. NewArts Int.

Cette nouvelle captation sur le vif de Semiramide réalisée à Gand en janvier 2011 nous donne l'occasion de saluer le plus juvénile des octogénaires, Alberto Zedda, infatigable acteur de la renaissance rossinienne et artisan, avec son complice Philip Gossett, de l'édition critique de cette partition majeure. Longtemps regardé comme un maestro concertatore concentré sur la préparation technique et stylistique de ses chanteurs, il y a belle lurette que cet artiste accompli s'est révélé parfait maestro direttore, à la tête d'orchestres trop souvent de second rang mais qu'il conduit avec une sûreté et une pertinence musicale partagée par bien peu de ses pairs dans ce répertoire. Equilibre des parties instrumentales et vocales, soin des récitatifs, fluidité d'un discours contrasté mais à la dynamique pondérée, aux crescendi jubilatoires exempts de toute hystérie mécanique, soutien amoureux de la ligne de chant : tedeschino ou italien pur jus, le Rossini de Zedda pétille comme aucun autre. Le présent enregistrement subsume et confirme ces qualités, mieux sans doute qu'aucun autre.

Le plateau, qui aborde l'œuvre pour la première fois, est hélas loin de se situer à pareil niveau de professionnalisme. La jeune Myrto Papatanasiu, hâtivement louée pour ses Violetta, Alcina et Fiordiligi, ne nous paraît nullement répondre, pour l'heure, aux critères d'un rôle conçu pour la Colbran, soprano aux couleurs de mezzo. Le timbre serait plutôt ici celui d'un leggero clairet, le phrasé généreux rachetant certes ce handicap - du moins jusqu'à la cabalette de "Bel raggio lusingher" dont la colorature excède cruellement les possibilités de la cantatrice grecque. La suite la voit plus assurée, sans que jamais cette approche du rôle ne dépasse le stade de l'ébauche. A cela, Zedda ne peut pas grand-chose. Et encore moins au fait qu'un ténor au timbre blanc et aux aigus problématiques ne puisse convaincre en Idreno. Aidée en revanche par les appoggiatures aiguës que lui écrit le chef, la contralto Ann Hallenberg supplée à la timidité de son medium et de ses accents. Mitrane et Oroe tiennnent leur rang, Assur devra assouplir son discours mais ne démérite pas. Si la maturité de Zedda fait ici de l'ombre à son enregistrement de 1982 à Turin (Ricciarelli et le ténor Gonzalez éclipsant néanmoins nos jeunes espoirs !), voire à celui de 1992 à Pesaro (avec Kunde), les éditeurs devraient songer à officialiser les bandes de 2001 ( Bruxelles, avec Takova, Podles, Blake !) et de 2004 (Madrid, avec notamment Barcellona et Siragusa). A défaut, réécoutons l'orchestre de Gand sublimé par notre cher Alberto.

J.C.