Riccardo Fassi (Figaro), Giulia Semenzato (Susanna), Germán Enrique Alcántara (le comte Almaviva), Federica Lombardi (la comtesse Almaviva), Hanna Hipp (Cherubino), Gregory Bonfatti (Basilio), Monica Bacelli (Marcellina), Gianluca Buratto (Bartolo), Jeremy White (Antonio), Alexandra Lowe (Barbarina), Alasdair Elliott (Don Curzio), Orchestre et Chœur du Royal Opera House, dir. Antonio Pappano, mise en scène : David McVicar (Covent Garden, 2022).
Opus Arte OA1356D. 3h05. Synopsis en anglais, sous-titres français. Distr. DistrArt Musique.
À l’instar de certaines de ses productions les plus populaires comme Don Giovanni ou La Flûte enchantée, le Royal Opera House propose ici la seconde captation d’un spectacle d’abord donné en 2006 et disponible chez Opus Arte. Seize ans plus tard, Les Noces de Figaro de David McVicar apparaissent toujours comme un spectacle d’une fort belle facture et d’une parfaite efficacité dramatique, bien que l’idée de transposer l’action de la « folle journée » dans la France de 1830 nous semble assez peu heureuse. Car si le choix de McVicar en vaut bien d’autres, on s’étonne cependant que le contexte précédant la révolution de Juillet ne soit nullement évoqué. On peut certes s’amuser de voir Figaro coiffé d’un haut-de-forme à l’occasion de son mariage, mais en quoi les costumes de l’époque romantique peuvent-ils vraiment contribuer à renouveler notre compréhension de l’œuvre ? Autre sujet d’étonnement, l’action, où intervient une véritable armée de domestiques constamment aux aguets, se déroule dans un château d’un tel gigantisme qu’on jurerait que le comte Almaviva a élu domicile aux Tuileries… Cela dit, il serait dommage de bouder son plaisir devant tant de splendeur visuelle et surtout devant une direction d’acteurs aussi affûtée qui témoigne d’un superbe esprit de troupe.
L’autre atout de cette version réside dans la distribution, composée en majeure partie de jeunes chanteurs italiens d’un naturel confondant et tous très crédibles dans leurs rôles respectifs. Au sein de cette équipe d’une belle homogénéité, il faut toutefois réserver une place d’honneur à Federica Lombardi, qui, faisant alors ses débuts à Covent Garden, prouve qu’elle a l’étoffe des grandes interprètes de la comtesse. Dès « Porgi amor », elle émerveille par un legato exceptionnel, la longueur du souffle et l’aisance souveraine de son chant. Acclamée comme il se doit après un « Dove sono » où sa voix dialogue délicatement avec les bois, elle sait traduire avec beaucoup d’éloquence les désarrois amoureux de la jeune épouse délaissée. Sans posséder pareil raffinement vocal, le baryton argentin Germán Enrique Alcántara (appelé tardivement à remplacer Davide Luciano) impressionne néanmoins par un instrument bien projeté et au timbre viril à souhait. Giulia Semenzato semble quelque peu intimidée au premier acte, mais la voix prend de l’assurance jusqu’à un air des marronniers où les moyens s’épanouissent pleinement. Sa complicité est totale avec Riccardo Fassi, Figaro d’une stature athlétique et aux indéniables qualités vocales et dramatiques, mais au faible volume sonore. Outre un grave manquant de consistance, il parvient tant bien que mal, dans la cavatine « Se vuol ballare », à donner des « Sì ! » particulièrement serrés dans l’aigu. Légère déception également du côté du Cherubino un brin trop scolaire de Hanna Hipp et dont le timbre opulent ne convient pas idéalement au jeune adolescent à peine sorti de l’enfance. Manifestement encore très épris l’un de l’autre dans cette mise en scène, Marcellina et Bartolo forment un duo irrésistible de drôlerie grâce à Monica Bacelli, dont le talent scénique compense l’usure vocale, et Gianluca Buratto, aux moyens imposants. Le Basilio retors de Gregory Bonfatti, l’Antonio vigoureux de Jeremy White et l’adorable Barbarina d’Alexandra Lowe sont tous trois remarquables.
Comme en 2006, Antonio Pappano confère toute la vivacité nécessaire dans les récitatifs et dirige l’orchestre avec une énergie débordante. Cette dernière n’est pas toujours exempte de brusquerie, voire de rudesse, mais s’harmonise finalement à l’atmosphère survoltée de la pièce, servie ici par une formidable équipe de chanteurs-acteurs.
Comme en 2006, Antonio Pappano confère toute la vivacité nécessaire dans les récitatifs et dirige l’orchestre avec une énergie débordante. Cette dernière n’est pas toujours exempte de brusquerie, voire de rudesse, mais s’harmonise finalement à l’atmosphère survoltée de la pièce, servie ici par une formidable équipe de chanteurs-acteurs.
L.B