Jennifer Rivera (Stellidaura), Carlo Allemano (Orismondo), Adrian Strooper (Armidoro), Enzo Capuano (Giampetro), Hagen Matzeit (Armillo), Accademia Montis Regalis, dir. Alessandro de Marchi (live 2013). Distr. Sony.
CD DHM 88883703852. Notice et livret en anglais.

Si l'on connaissait déjà Provenzale, le plus important compositeur napolitain "d'avant Alessandro Scarlatti", les partitions qu'en avaient jusqu'ici enregistré Antonio Florio et ses Turchini relevaient du genre sacré (y compris La Colomba ferita, Opus 111, 1997). La Stellidaura est donc l'un des tout premiers opéras sérias napolitains du XVIIe à nous être révélé. Même si, sur cet ouvrage créé en 1674 devant un public courtois, plane avant tout l'ombre du grand Cavalli, dont les œuvres étaient alors très appréciées à Naples (où elles étaient souvent données avec des intermèdes dus aux musiciens du cru - dont Provenzale). Le livret prolixe de Stellidaura compile ainsi les figures obligées de l'opéra vénitien - travestissements, échange de lettres, scène de prison, duel et même faux empoisonnement, comme dans L'Ormindo -, tout en limitant la distribution à cinq personnages, dont un serviteur s'exprimant en (faux) dialecte calabrais - anticipant ainsi sur les futurs schémas napolitains. La musique, elle aussi, regorge d'échos cavalliens, à commencer par un certain nombre de beaux lamenti,cohabitant avec des airs da capo annonçant Steffani. Mais si l'interprétation apparaît plutôt fastueuse, la "sauce" ne prend que par intermittences.

Faut-il en accuser une prise de son trop rapprochée ou le choix du direct, qui engage les interprètes à en "faire trop" ? Particulièrement le chef, qui cède à la tentation de sur-instrumenter et de sur-diriger l'œuvre, la plombant d'effets (contrechants, abus de vents et de cordes frottées - quatre violes ! -, jeux d'échos, bruitages) et bridant le naturel, la souplesse des chanteurs. Ceux-ci ne sont pas en reste, abusant, ci et là, d'accents véristes, qui pouvaient passer en scène mais gênent au disque. Malgré ces excès, on applaudit à la prestation efficace du baryton Capuano en valet abruti par qui la chance arrive, et à celle de deux ténors aux timbres fortement contrastés - barytonant et viril pour Allemano, di grazia pour Strooper - dans les rôles des soupirants de Stellidaura. La mezzo et le contre-ténor sont, eux, plus discutables... Le spectacle d'Innsbruck, en 2012, devait être passionnant ; le disque aurait sans doute gagné à être rééquilibré.

O.R.