Emily d’Angelo (Serse), Paula Murrihy (Arsamene), Lucy Crowe (Romilda), Mary Bevan (Atalanta), Daniela Mack (Amastre), Neal Davies (Ariodate), William Dazeley (Elviro), The English Concert, dir. Harry Bicket.
Linn 709 (3 CD). 2022. 2h54. Notice et livret en anglais. Distr. Outhere.
Il est difficile d’expliquer le succès remporté dans la presse d’outre-Manche par les Haendel de Bicket autrement que par un chauvinisme éhonté : ses lectures insipides, privées de ferveur dramatique, de pathos comme d’élan rythmique nous semblent toujours effectuées le petit doigt en l’air. Qu’il aborde la sanglante Rodelinda, la luciférienne Resurrezione ou les affres du psychopathe Serse, l’English Concert paraît toujours donner la sérénade dans un jardin anglais (d’où les mignons pizzicatos de « Nemmen coll’ombre »). Quant au chant, si l’on poussait jusque-là le politiquement incorrect, on se contenterait de dire qu’il est… britannique, c’est-à-dire plutôt exact (Davies, Murrihy) mais terriblement incolore (Mack). Faute de complicité orchestrale, William Dazeley jouant les serviteurs ivres est à peu près aussi drôle qu’un Mister Bean de sous-préfecture et le malheureux Arsamene aussi ennuyeux qu’une enfilade de cottages. En Romilda, Lucy Crowe tente de compenser une voix usée par des interpolations dont elle n’a pas toujours les moyens (écoutez les sonorités fixes de « Se l’idol mio») et qui conviendraient davantage à la coquette Atalanta (pas du tout caractérisée par la pâteuse Mary Bevan).
Alors pourquoi un « cœur » ? Pour le Serse impérieux, viril et expressif de la Canadienne Emily d’Angelo, vraie mezzo au grave nourri, applaudie en Rosine à l’Opéra de Paris en 2022 : si elle ne possède pas le glamour d’une Carolyn Watkinson (protagoniste de la version Malgoire, CBS/Sony, 1979) ni la démesure d’un Franco Fagioli (Serse de la version Emelyanychev, DG, 2017), elle est ici mieux qu’une promesse.
O.R