Peter Seiffert (Tristan), Nina Stemme (Isolde), Stephen Milling (Roi Marke), Jochen Schmeckenbecher (Kurwenal), Janina Baechle (Brangaine), Eijiro Kai (Melot), Carlos Osuna (Un berger), Marcus Pelz (Un pilote), Jinwu Xiahou (Un jeune marin). Orchestre Philharmonique de Vienne, dir. Franz Welser-Möst (live, Opéra de Vienne, juin 2013).
Orfeo C210123. Présentation bilingue (all., angl.). Distr. DistrArt Musique.
Voilà longtemps qu’on n’avait pas entendu de version marquante de Tristan. Rien, pourtant, n’était perdu : Franz Welser-Möst nous montre qu’on peut encore, dans le siècle nouveau, porter très haut l’opéra de Wagner. Le chef autrichien est, on le sait, plus apollinien que dionysiaque, porté surtout sur la transparence quasi chambriste des lignes et le raffinement irisé des couleurs, capable aussi de construire un récit. Et il dirige une Philharmonie de Vienne aux sonorités de rêve – les cordes dans le Prélude du troisième acte. Sans en avoir l’insolence, Nina Stemme, une autre Suédoise, succède dignement à Birgit Nilsson par l’ampleur et la sûreté des moyens, dix ans après sa prise de rôle à Glyndebourne. De la reine elle a la véhémence et la fragilité, la noblesse de la ligne : c’est la dernière grande Isolde, en attendant, sans doute, Lise Davidsen. Très usé mais très tenu, notamment dans un délire parfois presque panique, le vétéran Peter Seiffert, Tristan aussi phrasé qu’incarné, rappelle un peu Windgassen, assumant en tout cas, comme Stemme, l’héritage des grands titulaires du rôle. Il fallait que le disque perpétue le souvenir de ce couple, au demeurant plutôt bien entouré. Si la Brangaine très investie de Janina Baechle n’a pas les aigus très stables, Jochen Schmeckenbecher a les emportements de Kurwenal, Stephen Milling, un autre vétéran, la majesté de Marke, timbre royal, modèle d’équilibre entre l’intensité de l’émotion et la conduite de la voix.
Didier van Moere