Remy Burnens (Dormont), Claudia Urru (Giulia), Meagan Sill (Lucilla), Michele Angelini (Dorvil), Eugenio Di Lieto (Blansac), Emmanuel Franco (Germano), Orchestre Philharmonique de Cracovie, Gianluca Ascheri, pianoforte, dir. José Miguel Pérez‑Sierra. Sur le vif, festival de Bad Wildbad, 20 juillet 2021.
Naxos 8660512-13. Distr. Outhere.
Un musicien surdoué de vingt printemps offrait en 1812 sa relecture sémillante du Mariage secret de Cimarosa cher à Stendhal, qui voyait en cet opera buffa un modèle absolu du genre. La mouture rossinienne de l’ouvrage, empreinte de feinte ingénuité adolescente et de coquine légèreté, se voyait récemment honorée au festival de Bad Wildbad, cousin germain à tous égards de celui de Pesaro, dans une production d’une réelle lourdeur. On y voyait l’héroïne de ce dramma giocoso escalader l’échelle de soie qui la menait nuitamment auprès de son secret époux , au sein d’une régie théâtrale aux gros sabots. À l’écoute des présents CDs, on pourra heureusement imaginer sans contrainte les chassés-croisés du couple Dorvil – Giulia, du tuteur d’icelle, Dormont, comme de Blansac, le mari que ce dernier destinait à la belle, ou de sa cousine enamourée de l’infortuné. L’orchestre de Cracovie pétille sous la baguette diligente de Pérez-Sierra, hier assistant d’Alberto Zedda, maître incontesté en la matière. Le bel canto fleuri du jeune compositeur s’épanouit sur ce discours instrumental au petit point, relayé par les récitatifs que le pianoforte de Gianluca Aschieri brode de ses ornements. Sous les atours vocaux de Giulia, épouse secrète mais d’autant plus énamourée, la soprane Claudia Urru, dont le legato amoureux et les digressions virtuoses séduisent grâce à l’ingénuité d’un timbre encore adolescent, honore son emploi. Les impératifs de la régie théâtrale sont vraisemblablement responsables des tensions marquant certains traits des scènes finales. Le ténor Michele Angelini, juvénile et demi, exhibe un timbre rutilant et une virtuosité sans frein, au détriment parfois d’une émission un tantinet ouverte. Le comique du serviteur Germano va comme un gant au baryton Emmanuel Franco, rondouillard de voix comme de jeu, tandis que Blansac, séducteur finalement conduit à épouser la cousine de Giulia, est franchement desservi par le chant improbable d’Eugenio Di Lieto. Ladite cousine, Lucilla, dont l’air de sorbet atteste d’une tradition alors vivace, paraît ici sous les traits vocaux de l’américaine Meagan Sill, sans effacer le souvenir de Cecilia Bartoli en cet instant de divertissement belcantiste.
La discographie officielle de cette œuvre en tout point charmante se résumant à une poignée de captations, marquée par celle dudit Zedda en 2000 à Pesaro, la présente réalisation sur le vif y trouve tout naturellement sa place.
Jean Cabourg