Alexander Fritze. © SF / Marco Borrelli 

À chaque institution son académie et ses méthodes pour faire mûrir dans une durée allant d’une saison d’opéra à quelques semaines de festival. Le Festival de Salzbourg a sélectionné quinze jeunes chanteuses et chanteurs, dont certains ont aussi participé aux productions du festival dans des rôles plus ou moins importants – la soprano Jasmin Delfs a ainsi interprété pour un soir la Reine de la Nuit au Haus für Mozart.

D’un niveau global élevé, les jeunes artistes partagent un souci de la ligne et de l’incarnation dramatique et surprennent par une maturité vocale qui permet de les imaginer aisément aux côtés de leurs aînés sur les grandes scènes du Festival. Parmi eux, on distinguera ainsi : Flore Van Meerssche, Euridice de Gluck assurée et de beau style, Sofia Vinnik est un Sesto de caractère, au timbre chaleureux et s’acquittant des vocalises haendéliennes avec précision. Ann-Kathrin Niemczyck possède tous les moyens du soprano dramatique et aborde « Ô toi qui prolongea mes jours » avec autorité. Serafina Starke fait une Ännchen espiègle aux aigus ravageurs, et l’Idamante de Nicole Chirka séduit par l’ampleur et l’homogénéité de la voix conjuguées à un véritable tempérament. Jasmin Delfs s’illustre avec finesse puis énergie en Fille du régiment (« C’en est donc fait » – « Salut à la France ») et Alma Neuhaus est un Siébel touchant, au français soigné et à la ligne impeccablement maîtrisée.

Du côté des hommes, on demeure sous le charme de la prestation bouffe très stylée et parfaitement en place du baryton-basse Vladyslav Buialskyi dans le « Udite, udite o rustici » de Dulcamara, et la basse Aleksei Kulagin impressionne par la maîtrise de la ligne verdienne et son interprétation classieuse de la scène et l’air de Silva (« Che mai vegg’io » – « Infelice ! e tu credevi »).

Les autres s’illustrent mieux dans les nombreux ensembles que dans leurs prestations individuelles, comme la Donna Anna de Martina Russomanno dans le sextuor du deuxième acte de Don Giovanni ou le Papageno de Pete Thanapat dans le quintette « Hm, hm, hm » de La Flûte enchantée – autrement supérieur à celui entendu lors de la production du festival.

Ces débutants – qui ont déjà l’assurance d’artistes confirmés – sont accompagnés par l’orchestre du Mozarteum, conduit inégalement par Adrian Kelly, tonitruant dans le répertoire italien, plus à l’aise dans Mozart. On retient ainsi une belle moisson de talents à suivre.


Jules Cavalié


Adrian Kelly. © SF / Marco Borrelli