Maria José Siri (Suor Angelica), Anna Maria Chiuri (la Zia Principessa), Marina Ogii (la Badessa), Anna Malavasi (la Suora Zelatrice), Giada Frasconi (la Maestra delle novizie), Costanza Fontana (Suor Genovieffa), Elena Cavini (Suor Osmina), Nikoleta Kapetanidou (Suor Dolcina), Carmen Buendia (la Suora infermiera), Chœur, Chœur d’enfants et Orchestre du Mai musical florentin, dir. Valerio Galli, mise en scène : Denis Krief (Florence, 20/23.XI.2019).
Dynamic 37873. Notice et synopsis en ital. et angl. Distr. Outhere.

Dernier volet à nous parvenir du Trittico monté à Florence l’an passé et publié séparément par Dynamic, cette Suor Angelica permet de retrouver deux artistes qui tissent un lien dans la distribution de cette soirée lyrique : Maria José Siri, ici Angelica et déjà appréciée en Giorgetta du Tabarro ; Anna Maria Chiuri, Zita dans Gianni Schicchi et Frugola du Tabarro, ici tante princière de la précédente. Raidie par son personnage et son costume, Chiuri tient mieux les rênes de son vibrato et impose sans débord ni outrance une incarnation qui joue plus sur une indifférence terrible que sur une cruauté exacerbée. Siri, elle, émeut sans chercher à tirer les larmes, et c’est tout à son honneur ; son chant qui possède la volupté puccinienne (en termes de timbre comme de rapport au temps) n’en fait jamais démonstration. Sobre, simple et juste – et sachant galber ici ses éclats désespérés sans l’expressionnisme tranchant qui était sien dans le Tabarro.

Autour d’elle, les autres Sœurs sont bien caractérisées et complémentaires dans leurs individualités, mais on rêverait ensemble choral plus soyeux et lumineux. Il faut dire que la direction de Valerio Galli peine toujours à animer et nuancer le discours, voire à jouer des effets de relief et de lointain pourtant offerts sur un plateau par la partition, paraissant dérouler ses épisodes honnêtement mais sans arc impérieux.

L’absence de lointain de la scénographie, en revanche, est une idée judicieuse : rythmant en creux sa soirée trilogique, Denis Krief fait de la partie centrale du Trittico une apnée visuelle. Par nature carcéral (et ici sans aucun ornement, à la façon d’une architecture minimaliste), le cloître est privé des perspectives extérieures que le décor aménageait dans le Tabarro (le canal Saint-Martin) ou Gianni Schicchi (l’Arno et son Ponte Vecchio). Seule la mort ouvrira soudain l’horizon, dans un geste scénique d’ailleurs discret, qui se donne le temps de toucher les âmes plutôt qu’il n’assène un effet. Une belle réussite.


Chantal Cazaux