Thereza Holzbauer (Didone), Flavio Ferri-Benedetti (Enea), Valer Barna-Sabadus (Iarba), Magdalena Hinterdobler (Selene), Maria Celeng (Araspe), Andreas Burkhardt (Osmida). Hofkapelle München, dir. Michael Hofstetter (2011).
CD Naxos 8660323-25. Distr. Abeille Musique.
La voilà enfin, cette Didone abbandonata que Hasse écrivit en 1742 – pour l'anniversaire d'August III certes, mais d'abord sur mesure pour son épouse, Faustina Bordoni, prima donna de l'Opéra de Dresde. Inutile d'espérer monts et merveilles de cette modeste résurrection munichoise qui, si on en croit les photographies jointes au livret, a subi les outrages d'une mise en scène caricaturale signée August Everding. Thereza Holzbauer croit que les redoutables vocalises notées par Hasse ne sont qu'ornements (et ornements au mètre bien entendu2 010 une seule couleur, mille fois le même coup de glotte), elle les dévide en pure perte. Jamais le personnage n'apparaît, jamais le destin ne se montre, et pourtant elle sait phraser la belle supplique de « Non ha ragione ». Les deux contreténors font assaut d'une virtuosité toute relative et on s'inquiète d'entendre Valer Barna-Sabadus si incertain de ses placements, même si on doit lui concéder une vraie vaillance. On notera le bel Osmida d'Andreas Burkhardt, aux graves sans crainte. Il est le seul, avec Enée, à saisir la folie ravageuse qui anime le théâtre de Hasse, car cette Didone, si elle avait été distribuée à la hauteur de ses exigences, aurait révélé toute sa puissance : rien moins qu'un chef-d'œuvre où l'esprit de l'opéra vénitien règne encore au travers des arcanes du séria, et qui tiendrait la dragée haute à bien des partitions de Haendel autrement célébrées. En conscience, Michael Hofstetter fait du mieux qu'il peut, creusant les dynamiques, mettant dans son orchestre tout le drame et toutes les couleurs que ses chanteurs lui refusent. Il est grand temps qu'on lui donne les moyens de sa politique.
J.-C.H.