CD Myto 00329. Distr. Abeille Musique.
Créé en 1833 à l'Opéra de Paris, Ali Baba ou les quarante voleurs est le dernier opéra de Cherubini, et celui qui valut à Berlioz la haine définitive du compositeur. On se souvient en effet du récit savoureux de la première dans les Mémoires (chapitre 47) et des fameux « vingt francs pour une idée ! » lancés par le jeune homme depuis le parterre de l'opéra. Son jugement final est comme toujours partiel et partial mais ne manque pas de pertinence : « Cette partition, tout le monde en convint alors, est l'une des plus pâles et des plus vides de Cherubini ». Venant après plus de 20 ans de silence, l'œuvre en effet paraît stylistiquement bien datée. Cherubini y recycle la musique d'un opéra de la période révolutionnaire resté inédit (Koukourgi) et le livret de Scribe et Mélesville en reprend le schéma caractéristique d'opéra à sauvetage. Il ne reste pas grand-chose de l'intrigue initiale du Conte des mille et une nuits dans cette adaptation. Ali Baba est devenu un riche marchand qui a promis sa fille Delia au contrôleur des impôts et c'est Nadir, l'amoureux payé de retour, qui va découvrir la fameuse caverne et son Sésame, et offrir ainsi à son beau-père une fortune contre la main de sa fille. Entre-temps, Delia et son père auront été enlevés par les voleurs et sauvés par Nadir. Quelques pièces - et singulièrement l'ouverture à l'orchestration très originale - ont traversé les siècles. De beaux airs, ceux de Nadir au prologue ou de Delia à l'acte III, quelques ensembles habiles, une ou deux scènes comiques bien troussées ne réussissent pas à tirer cet opéra d'une certaine banalité. Il y avait là certes de quoi faire un excellent opéra-comique mais l'intrigue est un peu distendue pour un opéra en 4 actes avec prologue, même si, pour renforcer un peu l'intérêt, ont été ajoutées deux suites de ballet. Pourtant le public de cette reprise de 1960 à La Scala semble apprécier et s'amuser aux péripéties de la représentation. Il est vrai que le plateau est remarquable jusque dans les plus petits rôles, que ce soit du côté des basses bouffes ou du couple des jeunes premiers : Alfredo Kraus, idéal de timbre et de ligne et Teresa Stich-Randall, suave malgré quelques aigus un peu droits. Peut-être, avec l'image et dans la langue originale, l'opéra aurait-il quelque chance de s'imposer. Dans cet enregistrement en italien et malgré la direction très vivante de Nino Sanzogno, il ne peut s'adresser qu'aux inconditionnels de Cherubini ou à ceux d'Alfredo Kraus.
A.C.