Warner Classics 0190295614447. Présentation et chronologie trilingues (dont français), synopsis des opéras en anglais seulement. Distr. Warner Music.
Pour le cygne de Pesaro, le fonds manquait à Warner : la Rossini Edition n’atteignait pas son but. L’intégrale Debussy, en revanche, était un modèle du genre, avec son cortège d’inédits. L’intégrale Berlioz s’en approche aujourd’hui, même si les découvertes s’avèrent plus limitées. Le lecteur de L’Avant-Scène Opéra sait que La Damnation de Faust de Kent Nagano se situe très haut, que John Nelson a signé des versions de référence de Béatrice et Bénédict, Benvenuto Cellini ou Les Troyens. Pour le reste, rien à craindre : John Eliot Gardiner dirige l’Enfance du Christ et la Messe solennelle, Nelson se retrouve dans le Te Deum, les Ouvertures flamboient avec Roger Norrington, Adrian Boult, Mariss Jansons ou André Previn. La Fantastique de Jean Martinon est un modèle d’équilibre et a le mérite d’être suivie de Lélio, récité par le remarquable Jean Topart, alors que Harold en Italie brasille sous le soleil de Leonard Bernstein. Si nous préférons d’autres Roméo et Juliette que celui de Riccardo Muti, malgré la splendeur de sa plasticité, d’autres Requiem que celui de Louis Frémaux, on se régale des mélodies, puisées un peu partout, de l’album accompagné par Cord Garben au disque de Véronique Gens ou aux Nuits d’été à plusieurs voix de Gardiner – complétées par la version de l’incomparable Janet Baker, qui magnifie Herminie – on entend du coup, venu d’une autre écurie, un peu du grand berliozien qu’était Colin Davis. Michel Plasson, de son côté, avait enregistré des cantates. Les inédits ? D’assez inattendus Trois morceaux pour l’orgue mélodium d’Alexandre de 1844, « Le Dépit de la bergère », mélodie d’adolescent, des fragments de l’opéra avorté La Nonne sanglante, surtout, que ne manquera pas l’amateur d’opéra. Il y a enfin les incunables de rigueur, restaurés avec amour : le Méphisto de Maurice Renaud, les Didon de Marie Delna ou Felia Litvinne, captées au début du vingtième siècle, la première Fantastique de l’histoire du disque, par Rhené-Baton et son orchestre Pasdeloup, version claire et fougueuse de 1924 qui tient fort bien la route. En cette année Berlioz, chacun y va de son coffret, mais celui-ci s’impose.
Didier Van Moere