C Major 725208 Tutto Verdi 26. Distr. DistrArt Musique.
On est à Parme, pour ce Festival Tutto Verdi qui permit la captation de l’intégrale scénique en vidéo pour célébrer le bicentenaire de 2013. Pas au Teatro Regio, cette fois, mais au Farnese, cette merveille architecturale d’épicéa qui fut témoin des fêtes musicales de la Renaissance finissante, aux cortèges somptueux parcourant la longue cavea entourée de gradins, qui imposent ici, en disposition scénique classique, à la moitié des spectateurs un torticolis garanti. La captation frontale n’a pas ce problème et Stephen Medcalf en a logiquement installé l’action dans un décor simple où règne le bois. Au fond, un vaste écran dessinant une carte perspective de l’ancienne cité de Windsor, s’écartant pour laisser le passage au lit de bois de Sir John, très présent, et très occupé, à une myriade de draps séchant sur leurs cordes (on pense à Lavelli) et reprenant les motifs des maisons du plan, à une petite maison élisabéthaine, et enfin au grand chêne de Herne, bien sinistre. La production se regarde avec intérêt, classique et moderne à la fois, même si elle manque quelque peu de virevolte et de couleurs.
C’est côté partition que le bât blesse. Si Andrea Battistoni dirige bien, avec la verve requise, malgré quelques petites baisses de tension parfois, c’est le chant qui laisse comme une impression de précarité générale, dont surnage aisément le Falstaff d’Ambrogio Maestri qu’on ne présente plus (il est déjà documenté par trois fois en DVD, avec Muti, Gatti et Levine), et qui ne fait rien d’autre ici que ce qu’il fait usuellement dans ce personnage parfaitement rodé qu’il connaît sous toutes ses facettes, sans en tirer une leçon éblouissante. Mais on peine à écouter l’Alice de Svetla Vassileva, avec son gros vibrato, et la Meg de Daniela Pini, avec son aigu incertain et nasal, deux voix sans grande séduction, qui dépareront les ensembles. La Nanetta de Barbara Bargnesi est plus agréable, mais sans somptuosité, et son air de l’acte III la montre aux limites de la justesse. La Quickly de Romina Tomasoni est, elle, parfaitement à sa place, même si elle ne dispose pas d’un grave abyssal. Côté messieurs, c’est plus uniforme : le Ford de Luca Salsi est séduisant, sinon majuscule, et le Fenton d’Antonio Gandia le serait plus encore si son air perché dans le chêne ne s’avérait un désastre de justesse. Tant pis si Cajus et les deux compères de Falstaff sont au niveau requis de couinements et d’effets, on l’aura compris, on n’a ici ni un Falstaff de festival, ni moins encore une référence.
Pierre Flinois