Christopher Lowrey (Arminio), Anna Devin (Tusnelda), Sophie Junker (Sigismondo), Helena Rasker (Ramise), Paul Hopwood (Varo), Owen Willetts (Tullio), Cody Quattlebaum (Segeste), Orchestre du Festival Haendel de Göttingen, dir. Laurence Cummings (live 12 mai 2018).
CD Accent 26409 (3 CD). 2h44. Notice en anglais. Distr. Outhere.
Dès la saison prochaine, Laurence Cummings cèdera la direction du Festival Haendel de Göttingen à George Petrou : un excellent connaisseur du Saxon se substituera ainsi à son non moins pertinent prédécesseur, comme cela avait été le cas lorsque Nicholas McGegan s’était effacé au profit de Cummings. Au disque aussi, Cummings avait pris la suite de McGegan, poursuivant chez Accent l’entreprise d’enregistrement des ouvrages donnés par le Festival, que McGegan avait amorcée chez Harmonia Mundi. Arminio sera-t-il le dernier opéra de Haendel que Cummings enregistrera pour Accent ? Ou faut-il s’attendre à voir paraître Rodrigo, au programme du Festival, cette année ?... Quoi qu’il en soit, nous retrouvons ici avec plaisir la battue vive et naturelle du continuiste anglais qui, dès l’ouverture, joue habilement des nuances piano et forte et donne son juste caractère au délicieux menuet. Certes, sa direction, souvent rapide, apparaîtra moins contrastée, moins tellurique et sombre, moins riche en « intentions » que celle de Petrou (qui dirige un orchestre plus aguerri), mais elle laisse davantage d’espace à l’imagination de l’auditeur. Propre à sécuriser les chanteurs, elle leur lâche hélas un peu trop la bride et bien des cadences banales sont ici à déplorer.
Les chanteurs constituent, de toute façon, le talon d’Achille des intégrales de Cummings, les distributions réunies par Göttingen restant beaucoup moins prestigieuses que celles voulues par Decca et Parnassus Productions. Ainsi, même si Christopher Lowrey a fait de remarquables progrès, vocalise à ravir, habite réellement son personnage et se distingue par une diction superlative (préférable à celle de Cenčić), sa voix de contre-ténor, beaucoup moins large et puissante que celle de son rival chez Decca, peine à affronter jusqu’au bout le rôle écrit pour le castrat Annibali : les terrifiantes ruptures de registre de « Fatto scorta » s’en ressentent (et le da capo de « Ritorno alle ritorte » a été coupé)… Pareillement, Devin et Rasker « assurent » mais ne nous bouleversent guère, tandis que Willetts (que l’on retrouve dans le DVD de Petrou) Hopwood et, surtout, Quattlebaum s’avèrent médiocres. Le cas de Sophie Junker est particulier : tendue lors de son entrée, où point un dangereux vibratello, elle s’empare ensuite avec une fougue véritablement adolescente du personnage, réussissant notamment un réjouissant « Posso morir », d’ailleurs très applaudi. Plus vivante que l’intégrale de Curtis (Virgin, 2001) cette lecture ne peut cependant détrôner celle de Petrou (Decca, 2016).
Olivier Rouvière