CDPentatone PTC5186409. Distr. Abeille musique.
Signe des temps, jadis Rudolf Lustig, un Erik, un Loge, put se pendre pour Tristan et même essayer de donner le change à l'Isolde de Gertrude Grob-Prandl. Aujourd'hui, catastrophe ! Lance Ryan, ténor de caractère qui ferait déjà un Mime ingrat de timbre, aux aigus dans le nez, s'attaque au Siegfried de Götterdämmerung. Le résultat est d'autant plus pitoyable qu'en face de lui, Petra Lang, dans un de ses horribles jours qu'on lui connaît parfois, campe une Brünnhilde constamment fausse, timbre délavé, mots appuyés, une épreuve. Ce couple impossible ruine l'ultime étape d'un Ring qu'on avait jusque là chéri, et qui ne contient qu'une perle absolue, la Gutrune d'Edith Haller. C'est peu, car si Jochen Schmeckenbecher délivre toujours un Alberich suprêmement bien chantant, si Marina Prudenskaya soigne sa Waltraute, Matti Salminen a renoncé au chant pour parler son Hagen avec l'autorité qu'on imagine, et Markus Brück sonne anonyme pour les noirceurs de Günther. Comme conscient du quasi-naufrage, Marek Janowski semble hésiter entre la fresque et la poésie, et cette fois son orchestre est capté sourd, plat. Décidément une malédiction aura plané sur le dernier jalon du plus beau parcours wagnérien commis au disque depuis le début du XXIe siècle.
J.-C.H.