CD Challenge Classics CC 72565. Distr. NewArts.
On le sait bien depuis Aix-en-Provence : Evelyn Herlitzius est une grande Elektra d'aujourd'hui. Elle en a le format, voix longue et charnue, assez moirée, très sûrement conduite, sans distorsion des registres - l'aigu sonne juste, ce qui n'est pas toujours le cas. Elle en a l'endurance : elle tient bon, jusqu'à la fin, où beaucoup s'épuisent. Elle en a le profil, plus brisée par la douleur et la frustration qu'implacable furie vengeresse. à cette figure de l'ombre s'oppose la Chrysothémis à la féminité lumineuse et impatiente de Camilla Nylund. Au dessous se situe Michaela Schuster, Clytemnestre assez ordinaire, névrosée sans grandeur, qui manque de profondeur à partir du bas médium, alors qu'elle a le grand mérite de chanter tout son rôle et de ne pas exhiber, comme souvent, une voix en lambeaux. On peut passer sur Hubert Delamboye et Gerd Grochowski, dont on attendrait plus de présence en égisthe et en Oreste. Dans la fosse, en revanche, Marc Albrecht impose une vision à la fois violente et maîtrisée, d'une belle limpidité, tendant sans cesse l'arc de la tragédie, que flatterait davantage une captation moins enveloppée. Ce live ne manque donc pas d'avantages. Mais s'agissant de la discographie, la concurrence reste forte : si cette Elektra, affectée des coupures d'usage, complète les versions de référence, elle ne passe pas devant elle.
D.V.M.