Renée Fleming (Ariane), Sophie Koch (le Compositeur), Jane Archibald (Zerbinette), Robert Dean Smith (Bacchus). Staatskapelle de Dresde, dir. Christian Thielemann, mise en scène : Philippe Arlaud (Baden Baden, 2009).
DVD Decca 0440 074 3810 7. Distr. Universal.

Le moins que l'on puisse dire est que Christian Thielemann, le chef straussien par excellence aujourd'hui, n'est pas très heureux dans ses choix de productions. Philippe Arlaud, qui avait déjà décaféiné son Tannhäuser de Bayreuth, fut un éclairagiste de génie avant de passer à la mise en scène : on n'y a pas gagné. Son Ariane est certes d'une action très lisible et le prologue, dans les coulisses du spectacle donné en deuxième partie, est bien rythmé. Mais ce théâtre dans le théâtre fort convenu s'en tient à un premier degré bien peu stimulant, privilégiant une lecture platement lisse et d'une esthétique aussi naïvement sommaire que la direction d'acteurs. C'est d'autant plus regrettable que la direction de Thielemann sera pour beaucoup une révélation, voire une surprise. De celui que l'on sait si à l'aise dans les déferlements sonores d'Elektra et de La Femme sans ombre, on craignait un alourdissement du plus chambriste des opéras de Strauss : au contraire, il tire des splendides instruments de la Staatskapelle de Dresde des trésors de transparence. Pour sa prise de rôle en Ariane, Renée Fleming se grise de sa propre splendeur vocale, profitant ici pleinement d'un grave qui n'a fait que s'étoffer, mais le personnage reste indifférent. Sophie Koch est le Compositeur absolu de notre époque, mais au lieu de Diana Damrau pour compléter leur glorieux trio du Chevalier, on se contente ici d'une Jane Archibald honorable sans plus. Robert Dean Smith prend garde de chanter Bacchus au lieu de le crier, non sans une certaine pâleur. Le vétéran René Kollo en fait trop dans le rôle parlé du Majordome, les seconds rôles tiennent bien leur rang, dans une Ariane à écouter plus qu'à voir : l'exact contraire du Chevalier à la rose de Thielemann.

C.M.