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La production en 2012-2013. Photo : Lucie Jansch.

« Production mythique », « œuvre culte », « rituel », « expérience hypnotique »… les superlatifs ne manquent pas à l’annonce de la reprise au Théâtre du Châtelet de l’opéra en quatre actes (que l’on rangera plus volontiers dans la catégorie du théâtre musical) de Philip Glass et Robert Wilson (sans oublier la chorégraphe Lucinda Childs). Initialement créée au Festival d’Avignon 1976, remontée en mars 2012 à Montpellier, l’œuvre accoste à Paris dans le cadre du Festival d’Automne et se joue, au Théâtre du Châtelet, à guichets fermés – au point qu’une représentation supplémentaire a dû être ajoutée à la série prévue. « Succès programmé, succès confirmé », dirait le proverbe. Reste que l’on peut s’y avouer imperméable.

Deux évidences s’imposent d’emblée. D’une part, on admire la sublime beauté des images façonnées par Robert Wilson – leur composition épurée, comme les lumières irradiantes d’Urs Schönebaum. D’autre part, la performance des artistes est bluffante, qu’il s’agisse de danse – où se conjuguent fluidité et mécanisme –, de gestique – réglée comme une horlogerie – ou de musique – les chanteurs notamment défendent avec une qualité instrumentale un langage à la fausse simplicité d’exécution, sous la direction de Michael Riesman.

Mais force est de constater que le minimalisme s’accorde mal avec la grande forme, étranger par essence à l’arche comme au développement. Les 4 actes de l’ouvrage (et les 4 h 30 de la soirée) s’organisent ainsi par juxtaposition systématique, soulignée encore par un montage cut : le noir complet met fin à chaque tableau, comme le silence inopiné interrompt la musique. Celle-ci, répétitive – selon la terminologie en usage –, démultiplie ses boucles modales aux insensibles dérèglements internes, indéniablement séduisante parfois dans sa placidité New Age ou ses sonorités lorgnant vers l’Asie, frustrante pourtant quand son système générateur est par trop lisible.

Le projet s’assume comme conceptuel, distendant au maximum les liens de premier degré entre son contenu et son titre : pas plus de « Beach » que d’Einstein ici, à part quelques rares clins d’œil visuels et la volonté – en revanche permanente – de travailler sur le temps et l’espace. Louable intention, qu’une réalisation qui mêle les niveaux du symbolisme, de la fiction théâtrale et de l’abstraction pure, rend néanmoins souvent hermétique. Pour la durée immersive, on préférera une nuit de raga indien – et son souffle architectural. Pour la modalité « répétitive », un gamelan balinais – et son hétérophonie autrement subtile. Pour l’esthétisme glacé d’un rai de lumière façon monolithe, l’alliance Kubrick-Ligeti, qui vibre d’une fièvre ici trop réfrénée.

C.C.


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La production en 2012-2013. Photo : Lesley Leslie-Spinks.