Xu Chang (Pierre de Médicis), Aleksandra Buczek (Laura Salviati), Florian Sempey (Julien de Médicis), Yasushi Hirano (Fra Antonio), Juraj Holly (Paolo Monti), Jadwiga Postrożna (Henrietta). Chœur de la Philharmonie de Cracovie, Orchestre du Festival de Cracovie, dir. Massimiliano Caldi (Cracovie, live 23 juillet 2011).
FMP 201202. Distr. FMP. Extraits.
Un Poniatowski fut compositeur... et ténor : Joseph Michel Xavier (1816-1873), neveu du célèbre maréchal de France, petit-neveu du dernier roi de Pologne. Il naquit italien, devint français, fut sénateur du Second Empire et suivit Napoléon III dans son exil londonien. Ses opéras conquirent des scènes fameuses et l'Opéra de Paris représenta Pierre de Médicis en 1860, où il tint l'affiche sur quarante représentations, avant d'être accueilli à Lyon, Madrid et La Scala. Une histoire d'amour sur fond de politique, totalement imaginaire : deux frères, épris de la même femme, nièce du Grand Inquisiteur, s'affronteront dans une lutte fratricide et la malheureuse finira cloîtrée. On est dans l'esprit de l'opéra de l'époque, entre Donizetti et Meyerbeer, avec cavatines élégiaques et cabalettes virtuoses, ballet d'action et grands ensembles, rappelant parfois le premier Verdi - on devine ici et là des réminiscences des uns et des autres. Une grande fugue vocale, en revanche, annoncerait plutôt Falstaff. La musique exige des voix très sûres, à commencer par un ténor allant jusqu'au contre-mi bémol. Une musique diablement bien faite pour un amateur, aux mélodies galbées, avec de jolies parties de bois, qui ne vous lâche pas même si elle reste un peu brute.
En juillet 2011, l'exhumation de ce « grand opéra en quatre actes » de Poniatowski constitua un moment fort, avec la Messe en fa, du Festival de musique polonaise de Cracovie, attaché à la défense des répertoires oubliés ou méconnus. Comme l'œuvre avait disparu des théâtres, il fallut recopier et corriger les parties conservées à la Bibliothèque de l'Opéra de Paris. On ne nous offre malheureusement que des extraits de la partition, pourtant donnée en entier... cela suffira-t-il à intéresser des maisons d'opéra ou des salles de concert à Pierre de Médicis ? Elles devront alors trouver distribution plus adéquate. Rappelons au passage que les créateurs furent le couple Gueymard (le premier Henri de Montfort, la première Eboli), Louis-Henri Obin (le premier Philippe II et premier Procida) et Marc Bonnehée (le premier Simon de Montfort) : excusez du peu... A Cracovie, on reste assez loin du compte. Le ténor a les aigus bien campés, mais n'a guère idée du chant français, fait le stentor avec un accent impossible, plutôt proche d'un Cavaradossi de seconde zone. Si l'Inquisiteur est plus châtié, le seul à incarner l'authenticité stylistique reste Florian Sempey, brillant sujet de l'Atelier lyrique, belle voix, belle présence, émission souple et phrasé noble. Aleksandra Buczek laisse une impression plus mitigée : de jolis moments, une indéniable musicalité, mais une fâcheuse mollesse de la ligne et une agilité déficiente. Cela dit, l'attrait de la rareté finit presque par compenser les faiblesses de l'un ou de l'autre. Massimilio Caldi conduit avec enthousiasme et sens du théâtre un vaillant orchestre de jeunes, ainsi que l'excellent chœur de la Philharmonie de Cracovie. Très intéressante notice de Ryszard Daniel Golianek, spécialiste du compositeur.
D.V.M.