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Dominique Côté (Falke) et Marc Hervieux (Gabriel).

 

À l'instar de l'Opéra de Québec en 2011, l'Opéra de Montréal présente en ce début d'année La Chauve-Souris en version française plutôt que dans l'original allemand, mais déplace l'intrigue dans le Montréal des années 1930, ce qui justifie l'inclusion de quelques répliques et couplets en anglais. Si le traducteur, non identifié dans le programme, a fort habilement réalisé ce mélange occasionnel des deux langues, il a toutefois commis quelques maladresses dans un certain nombre de vers qui malmènent la prosodie. Cela dit, la transposition de l'action nous permet d'admirer deux magnifiques décors d'inspiration Art déco signés Richard Roberts pour la compagnie Opera Australia, avec en prime, chez Gabriel, une vue imprenable sur la croix illuminée du Mont-Royal. Cette même distinction se retrouve même dans la prison du troisième acte, qui possède un cachet assez inhabituel. Tout aussi somptueux, les costumes de la fête étonnent cependant par leur style évoquant bien davantage la Belle Époque que l'entre-deux-guerres. Beaucoup plus à l'aise dans l'univers étourdissant de Johann Strauss que dans l'atmosphère oppressante du Trouvère présenté l'an dernier, le metteur en scène Oriol Tomas caractérise bien chacun des principaux personnages tout en maintenant un bon rythme, qui pourrait toutefois être un peu plus effervescent, en particulier chez Orlofsky. Il nous réserve une surprise de taille dans ce même deuxième acte lorsque, plutôt que d'insérer une polka comme c'est souvent l'usage, il fait apparaître quatre danseurs entourant... Joséphine Baker, coiffée d'immenses plumes et qui entonne « J'ai deux amours ». L'effet est irrésistible.

La distribution, qui possède une belle homogénéité, permet notamment d'apprécier en Falke le baryton Dominique Côté, au timbre prenant, à la musicalité très fine et doté d'une réelle autorité scénique. En dépit d'un registre grave manquant parfois de consistance, Caroline Bleau a fière allure en Rosaline et maîtrise à peu près toutes les difficultés de sa redoutable czardas. Marianne Lambert est une Adèle lutine en diable, qui détaille avec précision ses lignes musicales, mais au timbre trop aigrelet. En bonne forme vocale, le Gabriel de Marc Hervieux semble moins prendre plaisir à la comédie que lors de sa prise de rôle en 2011, dans la production de Québec. Chantal Nurse en Joséphine Baker vole la vedette au prince Orlofsky quelque peu falot d'Emma Parkinson. Sans vouloir méjuger du talent du baryton Jonathan Bédard qui a fort peu à chanter, avouons que l'idée de lui confier le rôle d'Ida est tout à fait saugrenue. La partie plus franchement burlesque de l'opérette est assurée par le comédien Martin Drainville (Frosch) et surtout la basse Alexandre Sylvestre (Frank), qui fait preuve d'un abattage assez extraordinaire. Le chœur s'acquitte bien de sa tâche, même si ses effectifs se révèlent un peu insuffisants, remarque qui peut également s'appliquer aux rangs de l'Orchestre symphonique de Montréal. Ce dernier, dirigé par Timothy Vernon, a néanmoins présenté une lecture particulièrement soignée de l'œuvre, faisant ressortir, entre autres chez les cuivres et les bois, les multiples raffinements de la partition et concourant ainsi à la qualité générale de la représentation.

L.B.

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Caroline Bleau (Rosaline) et Marc Hervieux (Gabriel). Photos Yves Renaud.