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"Il a pansé la plaie..." : Chloé Briot (L’Enfant).
 

I-dé-al : c’est le qualificatif qu’appelle la production aixoise de L’Enfant et les Sortilèges, tant l’adéquation semble parfaite entre l’ouvrage si poétique de Colette et Ravel, le cadre délicat du Théâtre du Jeu de Paume et la réduction chambriste réalisée par Didier Puntos (une version pour piano à quatre mains, flûte et violoncelle, qui a fait ses preuves depuis 1986 déjà). S’y ajoutent une mise en scène onirique et un plateau vocal de jeunes et généreux talents, peaufinant l’une des plus délicieuses soirées de ce Festival 2012.

Arnaud Meunier situe L’Enfant dans le parfait royaume des rêves et cauchemars de l’enfance : un vieux grenier fourre-tout, par une nuit de pleine lune. Le décor de Damien Caille-Perret donne vie à une accumulation de meubles et jouets oubliés, d’abord poussiéreux puis animés par les Sortilèges du livret (et les lumières de Philippe Berthomé), lourds objets sombres et serrés se transformant d’eux-mêmes en forêt nocturne et inquiétante. Les instrumentistes s’y fondent comme des personnages à part entière, les costumes d’Anne Autran trouvent un point d’équilibre troublant entre charme désuet et fantastique effrayant – mi-poupée de son, mi-cagoule d’Homme-Elephant –, la direction d’acteurs mêle humour coquin (l’Horloge et la Théière, les Chats), violence sèche (la scène du Jardin) et réalisme judicieux grâce à un cast idoine – Eve-Maud Hubeaux (Maman), haute silhouette dominant la petite stature de Chloé Briot (l’Enfant). Tous les obstacles habituels (l’enfance tournant à l’enfantin, le vraisemblable mis à mal) sont ainsi levés, pour le plus grand charme de l’entreprise et du public.

La réduction de Didier Puntos, si ravélienne dans son instrumentarium et qu’il dirige du piano, use de modes de jeu imagés et diversifiés afin de rendre justice aux couleurs orchestrales de la partition originale. La poésie en est conservée, mais aussi son souffle lyrique lorsqu’il s’agit d’écriture vocale au contrepoint s’enflant comme une vague. Si certains jeunes chanteurs sont encore un peu extérieurs à leur personnage voire un peu verts, tous possèdent à plein les moyens vocaux de parties parfois redoutables et toujours originales : excellentes Mercedes Acuri (le Feu) et Clémence Tilquin (la Princesse), remarquable ténor de caractère de Valerio Contaldo, beau timbre plein de Guillaume Andrieux (l’Horloge et le Chat). Chloé Briot est un Enfant très crédible, de silhouette et de vocalité : format d’oiseau fragile, mais caractère aux duretés anxieuses. Soulignons enfin, pour l’ensemble de la distribution, un français parfait, et parfaitement compréhensible.

A la fin du rêve, on n’a pas envie de sortir d’un Jeu de Paume si joliment ensorcelé…

C.C.

Lire aussi notre édition de L'Enfant et les Sortilèges, ASO n° 299.


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Scène des Pastourelles et Pastoureaux. Photos Patrick Berger / ArtComArt.