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Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?

C’est un chaleureux enthousiasme qui a accueilli la dernière représentation de Caligula à l’Athénée, répondant par l’affirmative à l’interrogation de Lamartine. Caligula, ouvrage méconnu du tout autant méconnu Giovanni Maria Pagliardi (1640-1702), créé à Venise en 1672, était en ce début de mars parisien l’occasion d’un spectacle baroque et poétique, mêlant l’opéra à l’art traditionnel des marionnettes siciliennes. Dans le petit écrin de l’Athénée, les six instrumentistes du Poème Harmonique, placés sous la direction vivace de Vincent Dumestre, les six chanteurs se partageant les 9 personnages d’une intrigue échevelée et les six marionnettistes manipulant à vue leurs doubles de bois, composaient une troupe à la belle cohésion – regards échangés, entrées et sorties discrètement jumelées, corps effacés ou pris au jeu, selon les moments.

Certes les coloris instrumentaux manquaient parfois de variété, les chanteurs accusaient ici ou là quelque léger défaut de diction, d’intonation ou de précision dans l’ornementation. Mais cette cohérence attentive et empathique d’une troupe dont la jeunesse est autant la fragilité que l’atout, mise au service d’une partition resserrée à l’intrigue farfelue et néanmoins parfois touchante, permettait de savourer pleinement une proposition originale et dépaysante. Eclairages chauds façon rampe de bougies, marionnettes mi-naïves mi-précieuses dans leurs atours chatoyants, touches de comique léger, clins d’œil au Couronnement de Poppée – une nourrice piquante, un consul sage comme Sénèque, l’« Addio Roma » de Cesonia, impératrice exilée… : la découverte de l’œuvre est sympathique, et la compagnie Figli d’Arte de Mimmo Cuticchio révèle un art à la grâce magique. Encore une très belle trouvaille de programmation de l’Athénée !

C.C.


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Photos : Maroussia Podkosova